Des centaines de milliers de civils sont pris au piège, dans des conditions humanitaires désastreuses, dans le petit territoire bombardé sans relâche par Israël depuis l'attaque, sans précédent dans son histoire, menée le 7 octobre sur son sol par le mouvement islamiste palestinien qui contrôle la bande de Gaza.
"Beaucoup plus" de gens "vont bientôt mourir" dans la bande de Gaza, a averti vendredi à Jérusalem le directeur de l'Agence de l'ONU pour les réfugiés palestiniens (UNRWA), Philippe Lazzarini, en raison du siège imposé par Israël en représailles à l'attaque, qui prive le territoire d'eau, d'électricité et de nourriture.
Gaza a un besoin urgent d'aide humanitaire "significative et continue", a ajouté Philippe Lazzarini, confirmant la mort de 57 de ses employés dans le territoire palestinien depuis le début de la guerre.
Plus de 7.000 personnes, selon le Hamas, en majorité des civils dont environ 3.000 enfants, ont été tuées par les bombardements dans la bande de Gaza depuis trois semaines. Environ 1.400 personnes ont été tuées en Israël, selon les autorités, dont un millier de civils tués par les commandos du Hamas le jour de l'attaque.
Des sites du Hamas détruits
L'armée israélienne a annoncé vendredi avoir mené contre le Hamas un nouveau "raid ciblé" avec des forces au sol appuyées par des avions de combat et des drones dans le centre de la bande de Gaza, avant de quitter le territoire. L'incursion a eu lieu dans la nuit selon des images en noir et blanc publiées par l'armée montrant une colonne de véhicules blindés alors qu'un épais nuage de fumée s'élevait dans le ciel après des frappes.
Des sites du Hamas ont parallèlement été bombardés "dans toute la bande de Gaza", où des rampes de lancement de roquettes et des centres de commandement du Hamas ont été détruits, selon l'armée. Une première incursion nocturne avec des chars avait été menée la veille dans le nord de la bande de Gaza.
L'armée mène ces incursions dans l'attente d'une probable offensive terrestre contre le Hamas, évoquée à de multiples reprises par les responsables politiques et militaires israéliens. La perspective d'une telle offensive dans ce territoire surpeuplé inquiète la communauté internationale et les appels demandant à Israël d'épargner les civils se multiplient.
Israël a dit vouloir "anéantir" le Hamas, après l'attaque du 7 octobre. Ce jour-là, en plein Shabbat, le repos juif hebdomadaire, et au dernier jour des fêtes de Souccot, des centaines de combattants du mouvement islamiste s'étaient infiltrés sur le sol israélien depuis la bande de Gaza, semant la terreur.
Selon l'armée israélienne, 229 otages, israéliens, binationaux ou étrangers, ont été enlevés au cours de cette attaque par le Hamas, qui a relâché quatre femmes à ce jour. Le Hamas avait estimé jeudi que "près de 50" otages avaient été tués dans les bombardements israéliens.
"Couloirs humanitaires"
Dans la bande de Gaza, peuplée de 2,4 millions d'habitants, l'aide humanitaire arrive au compte-gouttes, en quantité très insuffisante selon l'ONU. Les Nations unies réclament la livraison en urgence de carburant pour faire fonctionner les générateurs des hôpitaux, débordés par l'afflux de milliers de blessés, qui manquent de médicaments et de produits anesthésiants notamment.
Depuis le 21 octobre, 74 camions d'aide sont arrivés depuis l'Egypte, selon le Bureau de coordination des affaires humanitaires de l'ONU (Ocha) jeudi soir. Soit bien moins que les 500 camions quotidiens qui parvenaient à Gaza avant le conflit. Ce territoire pauvre de 362 kilomètres carrés, soumis à un blocus israélien terrestre, aérien et maritime depuis que le Hamas y a pris le pouvoir en 2007, est placé depuis le 9 octobre en état de "siège complet" par Israël, qui y a coupé l'eau, l'électricité et l'approvisionnement en nourriture.
Face à cette situation, les dirigeants de l'Union européenne ont demandé jeudi des "pauses" dans le conflit ainsi que l'ouverture de couloirs humanitaires afin de faciliter l'acheminement de l'aide internationale. La Maison Blanche avait aussi suggéré mardi des "pauses", plutôt qu'un cessez-le-feu qui "à ce stade ne bénéficierait qu'au Hamas", classé organisation terroriste par les Etats-Unis, l'Union européenne et Israël.
Selon l'Ocha, citant le ministère des Travaux publics et du Logement de Gaza, 45% des habitations ont été "endommagées ou détruites" dans la bande de Gaza, où des quartiers entiers ont été rasés par les bombardements.
Depuis le 15 octobre, l'armée israélienne appelle la population du nord du territoire, où les bombardements sont les plus intenses, à évacuer vers le sud. Au moins 1,4 million de Palestiniens ont fui leur foyer depuis le début de la guerre, selon l'ONU. Mais les frappes continuent aussi de toucher le sud, où sont massés plusieurs centaines de milliers de civils près de la frontière égyptienne fermée.
Selon l'ONU, quelque 30.000 déplacés ont cependant regagné ces derniers jours le nord du territoire. "Nous retournons pour mourir dans nos maisons. Ce sera plus digne", a affirmé Abdallah Ayyad, qui après s'être réfugié dans un hôpital à Deir el-Balah, retourne à Gaza-ville, avec sa femme et leurs cinq filles, serrés dans la remorque d'un triporteur.
Frappes américaines
La communauté internationale redoute un embrasement dans la région, alors que l'Iran, puissant soutien du Hamas, a lancé plusieurs avertissements aux Etats-Unis, allié d'Israël. Le ministre américain de la Défense, Lloyd Austin, a annoncé que les Etats-Unis avaient mené des frappes jeudi contre deux installations utilisées par les Gardiens de la révolution iraniens et des "groupes affiliés" dans l'est de la Syrie.
Le président Joe Biden avait plus tôt adressé un message au dirigeant suprême iranien, l'ayatollah Ali Khamenei, pour le mettre en garde contre toute attaque visant les troupes américaines. Jeudi, devant les Nations unies, le ministre iranien des Affaires étrangères, Hossein Amir-Abdollahian, a déclaré que l'Iran ne souhaitait pas l'extension du conflit. "Mais je préviens que si le génocide à Gaza se poursuit, ils ne seront pas épargnés par ce feu", a-t-il ajouté, s'adressant aux Etats-Unis.
La tension est très vive aussi en Cisjordanie, territoire palestinien occupé par Israël depuis 1967, ainsi qu'à la frontière nord d'Israël avec le Liban, où les échanges de tirs sont quotidiens entre l'armée israélienne et le Hezbollah, soutenu par l'Iran et allié du Hamas.
En Cisjordanie, plus de cent Palestiniens ont été tués dans des violences depuis le 7 octobre, selon le ministère palestinien de la Santé. Des appels à manifester, après la prière du vendredi, ont été lancés dans plusieurs villes, dont Naplouse et Hébron. Quatre Palestiniens ont étés tué vendredi à l'aube lors d'incursions de l'armée israélienne dans le nord de la Cisjordanie occupée, selon l'agence officielle palestinienne Wafa.
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