Médecins Sans Frontières (MSF), Oxfam, la Croix Rouge, Action contre la faim (ACF)...: les membres des grandes ONG et leurs personnels locaux sont pris dans le tourbillon des violences entre bandes armées ex-Séléka pro-musulmans et anti-Balaka pro-chrétiens qui déchirent le pays depuis 2013.
Depuis le début de l'année, 123 incidents visant des humanitaires ont été enregistrés (intrusion d'hommes armés, assauts, vols, ...) selon International NGO Safety Organisation (INSO) qui recense les exactions contre les ONG dans le monde. Six travailleurs humanitaires sont morts en 2016 en Centrafrique, selon l'ONU.
"Le pays reste un des plus dangereux pour les travailleurs humanitaires, avec 31 % des problèmes de sécurité rencontrés par les agents humanitaires dans le monde en 2016", a récemment déclaré le secrétaire général des Nations unies Antonio Guterres dans un rapport d'activité de l'ONU en Afrique centrale.
Alors que le calme est revenu dans Bangui, les ONG doivent souvent ralentir voire suspendre leurs opérations dans l'intérieur en raison de l'insécurité, accentuant la détresse des populations.
En avril, MSF avait ainsi dû réduire ses effectifs à Kabo (centre-nord), après une "attaque qui a fait suite à une longue série de braquages dans la région affectant d'autres organisations internationales [ainsi] que la population civile", selon un communiqué.
En mai, l'ONG s'est encore retrouvée en première ligne à Bangassou, où plusieurs dizaines de civils ont été tués quand un groupe armé non-identifié a attaqué le quartier musulman.
"Les équipes ne pouvaient juste pas sortir car on avait aucune certitude sur la situation sécuritaire", avait alors témoigné à l'AFP René Colgo, chef de mission adjoint MSF à Bangassou où les héritiers des "French doctors" gèrent un hôpital.
"On a essayé de faire comprendre aux groupes armés que l'hôpital que nous soutenons est une structure neutre", avait-il ajouté.
"Pas assez" de financements
Ce même mois, le regain de violences a touché Alindao et Bria (centre), et les ONG qui y opèrent.
A Bria, un humanitaire préférant garder l'anonymat dénonce "un accès encore difficile" dans la zone. "On reprend peu à peu les activités. On a beaucoup de mal à trouver un terrain d'entente avec les groupes armés. Pourtant on discute avec eux tous les jours".
Lundi, le directeur des Opérations du Bureau de la Coordination des Affaires humanitaires (OCHA), John Ging, s'y est rendu pour établir un bilan des besoins.
Il n'y a "pas assez" de financements, a-t-il regretté. "Nous vivons dans un monde riche mais les pays riches ne font pas assez pour aider l'humanité."
"Au premier semestre 2017, le Plan de réponse humanitaire, d'un montant de 399,5 millions de dollars, n'est financé qu'à hauteur de 27,8%", indique OCHA, qui fait état de ce manque de fonds dans chacun de ses bulletins mensuels.
"Pour la première fois depuis août 2014, le nombre des déplacés a atteint 500.000 personnes. Il est passé de 440.400 personnes en avril à 503.600 en mai, soit une augmentation de 14%", s'alarme encore l'agence onusienne.
Après la conférence internationale des donateurs en novembre à Bruxelles qui a promis 2,2 milliards de dollars pour le relèvement de la Centrafrique, le président Faustin-Archange Touadéra s'est inquiété à plusieurs reprises que son pays ne disparaisse de l'agenda international.
La Centrafrique a basculé dans les massacres de masse en 2013 avec le renversement du président Bozizé par l'ex-Séléka, entraînant une contre-offensive des anti-Balakas.
Les interventions de la France (2013-2016) et de la Minusca (12.500 hommes) ont ramené le calme dans Bangui mais 50 à 60% du pays reste sous le contrôle des groupes armés.
Avec AFP