Quelque 80 militaires d'élite français, suédois, estoniens, tchèques, italiens, belges, portugais et hollandais de cette nouvelle Task Force ouvriront le défilé du 14 juillet sur les Champs Elysées, à l'occasion de la fête nationale.
Le président Emmanuel Macron, qui vient d'annoncer une réduction progressive des effectifs militaires français au Sahel après huit ans de présence ininterrompue, compte sur Takuba pour jouer un rôle central dans le futur dispositif.
Concrètement, la France va renoncer à essayer de sécuriser de vastes zones où les Etats n'arrivent pas à reprendre pied. Les missions seront désormais axées sur le contre-terrorisme, ainsi que sur l'appui aux armées locales pour les aider à monter en puissance et s'autonomiser, via les troupes européennes de Takuba.
"Il y aura une place majeure de Takuba dans les prochains mois et années" dans le cadre de la transformation de l'opération française Barkhane, qui compte aujourd'hui plus de 5.000 hommes, commentait récemment la ministre française des armées, Florence Parly. Mais elle ajoutait: "Takuba n'a pas vocation à se battre à la place des Maliens".
Leur mission: accompagner de petites unités maliennes équipées de pick-ups et de motos, pour les aider à s'aguerrir et reconquérir des pans de territoire semi-désertiques, délaissés depuis longtemps par l'Etat malien.
"On va se concentrer non pas sur la destruction de l'ennemi mais sur la construction de l'ami", explique à l'AFP le lieutenant-colonel François, qui a commandé la TF Takuba au Mali de janvier à avril.
Takuba rassemble 600 hommes à Gao et Menaka, dont une moitié de Français - issus des forces spéciales mais aussi des forces conventionnelles -, ainsi que des Estoniens, des Tchèques, des Italiens et des Suédois.
Le Danemark a promis une centaine d'hommes, la Roumanie une cinquantaine et d'autres nations, comme la Grèce, la Hongrie ou la Serbie, ont exprimé leur intérêt.
Cours de français
Convaincre les partenaires de déployer des troupes au Sahel ne s'est pas fait sans mal. Les interventions armées sont politiquement sensibles dans la plupart des pays européens, qui ont besoin du feu vert de leur Parlement pour s'engager.
Paris ne cache donc pas sa satisfaction d'être parvenu à amorcer une mutualisation de l'effort, alors qu'Emmanuel Macron a fait de l'Europe de la défense un des chevaux de bataille de son quinquennat.
"Très peu de pays dans le monde ont la capacité de monter une coalition", fait valoir l'état-major français.
Pour ce qui est de faire fonctionner ce patchwork de nationalités, "l'interopérabilité des forces spéciales européennes fonctionne très bien, nous partageons les normes OTAN, et en Irak comme en Afghanistan on travaillait déjà ensemble", assure le lieutenant-colonel François, en précisant que tous les nouveaux venus "ont pris des cours de français".
Avec ce nouveau dispositif sonne l'heure de vérité pour les armées locales, qui vont se retrouver en première ligne de l'effort sécuritaire dans la région dite des trois frontières, aux confins du Mali, du Niger et du Burkina Faso, réputée servir de sanctuaire aux groupes jihadistes.
Le périmètre d'action de Takuba, pour l'heure circonscrit à cette zone, pourrait même être étendu plus à l'ouest, vers le Gourma malien, dans la boucle du fleuve Niger.
Reste à voir si l'appui apporté par Takuba parviendra à faire durablement monter en gamme les forces armées d'un des pays les plus pauvres du monde, après de longues années d'efforts de formation prodigués avec des résultats très mitigés par la mission européenne EUTM.
"Les forces maliennes n'ont pas beaucoup de moyens mais l'ennemi est à la portée de leurs capacités. L'adversaire a recours au minage, aux roquettes, mais une fois au contact, ça ne marche plus", fait valoir l'ancien commandant de Takuba.
Le défi n'en est pas moins de taille et les attentes élevées, dans des pays européens ayant engagé leur crédit politique dans ce conflit qui s'éternise et a coûté la vie à 50 Français.
"Quand on va avoir un Européen au tapis, ça va être la douche froide", redoute un observateur.