Le pays est quasiment à l'arrêt, mais les Français sont tout de même appelés à voter dimanche pour le premier tour des élections municipales, aux enjeux éclipsés par l'épidémie de coronavirus dont le pays est l'un des principaux foyers en Europe.
Samedi soir, à quelques heures de l'ouverture des bureaux de vote, le Premier ministre Edouard Philippe l'a annoncé: le pays tout entier est mis presque à l'arrêt, avec restaurants, cinémas et commerces non essentiels fermés, et les Français appelés à ne pas se déplacer pour tenter d'enrayer la propagation vertigineuse du Covid-19 en France, qui comptait 4.500 cas pour 91 morts samedi soir.
Les rassemblements de plus de 100 personnes sont également interdits.
Pour autant, le gouvernement, dont deux membres sont malades, estime que le scrutin peut être maintenu. "Pas de risques sanitaires particuliers", martèle-t-il depuis qu'Emmanuel Macron a annoncé jeudi soir le maintien du scrutin.
Poignées de porte, tables, isoloirs... tout sera nettoyé avant le vote et des mesures sont prises pour éviter les files d'attente et faire respecter les distances de sécurité.
Le ministère de l'Intérieur recommande même aux électeurs d'apporter leur propre stylo pour signer les cahiers d'émargement, "à condition que l'encre soit bleue ou noire et indélébile".
"Est-ce qu'aller voter est comparable à faire ses courses au supermarché? Le risque n'est pas plus grand que la possibilité qu'on leur laisse d'aller faire leurs courses", a justifié vendredi midi Jean-François Delfraissy, qui préside le conseil scientifique sur le coronavirus.
La France fait partie des principaux foyers d'infection dans le monde. Dans ce contexte, une forte abstention est à craindre pour un scrutin dont l'enjeu politique est largement relégué au second plan.
Les municipales en France sont habituellement une élection à forte participation (63,5% en 2014) mais selon un sondage, un tiers des Français estime qu'il y a un risque élevé d'être exposé au virus en allant voter.
Pour les spécialistes, une baisse de la participation chez les seniors pourrait surtout pénaliser la droite qui compte davantage sur un électorat âgé.
- Quid du parti de Macron? -
La performance des candidats du parti présidentiel (La République en marche, centre), qui n'existait pas lors du précédent scrutin en 2014, sera forcément suivie de près.
L'exécutif a traversé une période délicate ces derniers mois, parsemée de mouvements sociaux comme les gilets jaunes ou la grève contre la réforme controversée des retraites.
Ses candidats sont loin d'être favoris dans la plupart des villes, et même le Premier ministre Edouard Philippe, qui se présente dans son fief du Havre (nord-ouest), n'est pas certain de l'emporter. Une défaite mettrait assurément en danger son poste à la tête du gouvernement.
A Paris, c'est l'ex-ministre de la Santé Agnès Buzyn qui a été envoyée au front après une campagne chaotique. Elle a dû remplacer, il y a à peine un mois au pied levé, Benjamin Griveaux, emporté par un scandale après la révélation de vidéos intimes.
Elle est légèrement en retrait dans les sondages, troisième (19%) derrière la maire socialiste sortante Anne Hidalgo et son adversaire de droite Rachida Dati au coude à coude (25%).
Les partis historiques espèrent en profiter dans de nombreuses villes, mais la droite est divisée dans certains bastions comme Marseille (sud-est), tandis que la gauche devra composer avec la percée écologiste dans des villes moyennes comme Besançon (est), Tours (centre) ou Rouen (nord-ouest).
Les résultats devraient toutefois être difficiles à décrypter au niveau national tant le traditionnel clivage gauche-droite s'est effacé en France depuis l'élection du centriste Emmanuel Macron à la présidence en 2017.
Les listes "sans étiquette" pullulent et les discussions d'entre-deux-tours seront cruciales dans de nombreuses villes.
Plus de 900.000 candidats brigueront dimanche l'un des quelque 500.000 sièges de conseillers municipaux.