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La Gambie écrit une nouvelle page de son histoire


Des Gambiens jubilent dans les rues après l’annonce des résultats provisoires donnant vainqueur le candidat de la coalition de l’opposition Adama Barrow devant le président sortant Yahya Jammeh Serrekunda, Gambie, 2 décembre 2016
Des Gambiens jubilent dans les rues après l’annonce des résultats provisoires donnant vainqueur le candidat de la coalition de l’opposition Adama Barrow devant le président sortant Yahya Jammeh Serrekunda, Gambie, 2 décembre 2016

La Gambie entamait une nouvelle page de son histoire samedi, au lendemain de la reconnaissance par Yahya Jammeh, qui a dirigé le pays 22 ans, de sa défaite aux urnes face à l'homme d'affaires Adama Barrow, un retentissant dénouement électoral salué à travers le monde.

Aux jubilations constatées vendredi dans les rues pour saluer la défaite de Jammeh, dont les portraits sur les affiches ont été arrachés ou piétinés, a succédé samedi matin le calme des lendemains heureux, a-t-on constaté à Banjul.

Par rapport à la veille, moins de forces de défense et de sécurité étaient visibles dans les rues, à l'exception de leurs lieux habituels de déploiement.

Toutefois, beaucoup s'interrogeaient encore sur les derniers développements spectaculaires dans ce pays enclavé dans le territoire sénégalais hormis sa façade atlantique, développements ayant levé les craintes de troubles post-électoraux exprimées dans certains milieux.

Arrivé au pouvoir par un coup d'Etat en 1994, Yahya Jammeh avait été élu une première fois en 1996 pour cinq ans, puis réélu trois fois.

Il s'était déclaré sûr d'obtenir un cinquième mandat jeudi, et ses détracteurs lui prêtaient l'intention de n'accepter aucune autre issue. A la surprise générale, il a reconnu sa défaite dans une déclaration télévisée vendredi soir.

"Vous, Gambiens, avez décidé que je devais être en retrait" à l'issue de la présidentielle de jeudi, "vous avez parlé sans ambiguïté", a déclaré ce militaire retraité, avant de féliciter Adama Barrow pour sa "victoire claire".

Devant les caméras, il a téléphoné à son tombeur, un homme d'affaires inconnu sur la scène politique six mois auparavant, lui disant notamment: "Je vous souhaite bonne chance, le pays sera entre vos mains en janvier et vous pouvez compter sur mon aide durant votre transition".

Jusqu'à samedi en fin de matinée, rien ne permettait cependant d'expliquer ce qui a favorisé un tel scénario, d'autant que Jammeh a gouverné sans partage et gardé la majorité des Gambiens dans le rang notamment par la répression - parfois sanglante - de toute contestation et la peur des pouvoirs mystiques dont il se dit doté.

Si certains s'interrogeaient sur son sort, lui-même semblait serein quant à son avenir post-pouvoir: il ne s'exilera pas et mènera une vie de paysan à Kanilai, son village natal dans l'ouest de la Gambie, a-t-il assuré dans son message télévisé.

- 'Tout va bien!' -

Jeudi, quelque 890.000 Gambiens - sur près de 2 millions d'habitants - étaient appelés aux urnes pour départager Yahya Jammeh, Adama Barrow et un troisième candidat, Mama Kandeh, tous nés en 1965, année de l'indépendance du pays.

Selon les résultats du scrutin publiés vendredi, Yahya Jammeh s'est classé deuxième avec 36,6% des voix derrière Barrow, crédité de 45,5% des suffrages. Mama Kandeh a eu 17,8% des voix. La participation avoisinait les 65%.

Adama Barrow, qui avait invité vendredi ses compatriotes à "se mettre au travail", s'y attelait samedi. Il devait rencontrer les responsables des partis l'ayant désigné candidat unique, selon une source dans son entourage.

De source diplomatique, il devrait aussi s'entretenir avec le représentant spécial du secrétaire général de l'ONU en Afrique de l'Ouest et au Sahel, Mohamed Ibn Chambas.

Depuis vendredi, beaucoup de Gambiens font état d'un bonheur inextinguible. Parmi eux, Fatma Secka, 35 ans, vendeuse à l'étal, alternant encore samedi entre sourires et éclats de rire. "Je me sens heureuse, libre! J'ai un nouveau président, tout va bien"!, a-t-elle lancé.

"Je suis vraiment heureux parce que nous nous sommes débarrassés du mal", expliquait Lamin Kuyateh, 56 ans, rencontré au marché artisanal, avant de s'emparer d'une kora, sorte de harpe locale, et d'improviser une chanson: "Gambie, Gambie, nouveau président".

Les félicitations internationales à l'adresse des Gambiens, de Barrow pour sa victoire et de Jammeh pour avoir accepté sa défaite, se sont multipliées.

Après la Commission économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (Cédéao), l'Union africaine, l'ONU et les Etats-Unis ainsi que des ONG dont Human Rights Watch, le Sénégal, unique voisin terrestre de la Gambie, a joint sa voix au concert d'hommages.

Selon un communiqué officiel, le chef de l'Etat sénégalais Macky Sall a par ailleurs eu vendredi un entretien téléphonique avec Adama Barrow, lui exprimant "sa ferme volonté de travailler avec lui au renforcement des relations" entre les deux pays, ayant été compliquées durant la présidence de Jammeh.

Avec AFP

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