"La loi anti-terroriste, promulguée pour combattre le groupe extrémiste Boko Haram, est utilisée pour faire taire les journalistes qui enquêtent sur le groupe (Boko Haram, ndlr), ou sur les troubles civils qui sévissent dans les régions anglophones du Cameroun", a affirmé le Comité de protection des journalistes (CPJ), une ONG basée aux Etats-Unis.
Le texte évoque le cas du correspondant en langue haoussa de Radio France Internationale (RFI), Ahmed Abba, arrêté en 2015 dans la région de l'Extrême-Nord, qui subit les attaques répétées de Boko Haram, et qui a été condamné à dix ans de prison pour "blanchiment d'actes de terrorisme".
"Le CPJ a constaté que les autorités se servent de cette loi contre des journalistes comme Abba, qui font des rapports (ndlr: reportages) sur les militants, et contre d'autres qui ont fait des reportages sur les troubles survenus dans les régions anglophones du Cameroun ou qui critiquent l'administration Biya", selon le rapport.
"La plupart d'entre nous qui sommes dans les médias privés n'avons que la liberté de rapporter ce que le gouvernement souhaite voir", a témoigné un propriétaire de journaux cité dans le rapport de façon anonyme, expliquant qu'il y a "un climat de peur" au Cameroun sur ces questions.
L'ONG dénonce l'auto-censure que s'imposent les journalistes pour éviter "le problème d'être surveillés" ou "échapper aux rafles de ceux qui cherchent à leur imposer silence", selon les propos au CPJ d'un journaliste camerounais, qui a aussi requis l'anonymat.
L'association dénombre cinq journalistes qui ont été ou sont poursuivis en vertu de la loi anti-terroriste de 2014 pour leur travail journalistique, et dit enquêter sur plusieurs autres affaires.
"Quand vous assimilez le journalisme au terrorisme, vous créez un environnement dans lequel moins de journalistes sont disposés à couvrir les sujets sérieux qui font l'actualité par craintes de représailles", a souligné Angela Quintal, directrice Afrique de l'ONG et auteure du rapport.
Le Comité de protection des journalistes réclame la libération de "tous les journalistes emprisonnés" et appelle Yaoundé à "promouvoir un environnement propice à la liberté de la presse en révisant sa législation anti-terroriste de 2014".
Des élections présidentielle et législatives doivent se tenir au Cameroun en 2018.
Avec AFP