Cette mesure, devenue une priorité pour la National Rifle Association (NRA), le premier lobby des armes, s'inspire de ce qui existe en matière automobile: quel que soit l'Etat américain dans lequel on l'a obtenu, le permis de conduire est valide sur l'ensemble du territoire.
Cette idée qualifiée d'"incroyablement stupide" par le Los Angeles Times et dénoncée par les associations luttant contre les violences par balles concerne les autorisations de transport d'une arme dissimulée sous les vêtements, dans le coffre ou la boîte à gants d'une voiture.
Tous les Etats américains et la capitale fédérale Washington prévoient cette possibilité pour leurs citoyens. Dans 12 Etats, elle va de soi. Mais, dans 28 Etats, elle est assortie de la présentation impérative d'un permis plus ou moins aisé à obtenir.
En pratique, il est très difficile d'obtenir un tel permis dans des Etats comme la Californie ou New York, qui exigent que le candidat avance une "bonne raison" justifiant sa nécessité de se déplacer armé.
Mais, "dans 41 des 50 Etats, le citoyen lambda n'a pas besoin de montrer grand chose pour obtenir un permis d'arme dissimulée", explique à l'AFP Gregg Carter, un expert de la Bryant University à Rhode Island.
- Malgré les tueries -
L'idée de la NRA est d'imposer une réciprocité entre les Etats. New York et la Californie seraient alors contraints d'accepter qu'un habitant de Louisiane ou de Floride, où les armes pullulent et les permis sont facilement attribués, puisse se comporter chez eux comme chez lui.
Si elle est adoptée, la loi "permettra à d'innombrables auteurs de violences conjugales et harceleurs de se déplacer armés dans tout le pays", a averti cette semaine Everytown for Gun Safety, une organisation qui lutte contre la prolifération des armes aux Etats-Unis.
L'examen de cette proposition de loi au Congrès témoigne qu'en dépit de récentes fusillades qui ont choqué l'Amérique, le lobby des armes parvient à faire progresser ses objectifs.
Un retraité a tué 58 personnes et en a blessé près de 500 en ouvrant le feu sur les spectateurs d'un concert de musique country à Las Vegas en octobre. Le 5 novembre, un ex-caporal a fait 25 morts dans une église du Texas, dont des enfants et une femme enceinte.
Pas moins de 24 procureurs généraux - chefs des autorités judiciaires de leur Etat - ont adressé vendredi au Congrès une lettre de soutien à la mesure de réciprocité des permis.
"Les Etats qui empêchent les visiteurs respectueux des lois de porter leur arme dissimulée mettent leurs habitants en plus grand danger de violence armée, et non en moindre danger. Ces Etats laissent les citoyens sans véritable option pour se défendre", ont-ils écrit.
- Soutien républicain -
Quelques jours plus tôt, 17 procureurs généraux s'étaient au contraire déclarés contre la proposition de loi.
D'autres organisations représentant les maires ou les parquets judiciaires, comme la Conference of Mayors ou l'Association of Prosecuting Attorneys, ont prévenu que la loi effacerait les restrictions prises localement et compliquerait la mission des policiers.
Un grand rassemblement était prévu mercredi sur la colline du Capitole, réunissant notamment des familles de victimes de récentes tueries comme celle de l'école primaire Sandy Hook (20 enfants tués), l'église de Charleston (neuf paroissiens noirs tués), le cinéma d'Aurora (12 tués) ou San Bernardino (14 morts).
La très vaste majorité des républicains qui contrôlent le Congrès soutiennent la proposition de loi.
Ils ont joint au texte une disposition améliorant les contrôles d'antécédents judiciaires et psychiatriques pour tout acheteur d'arme, une façon de piéger leurs rivaux démocrates qui exigent depuis longtemps une telle mesure de "bon sens".
Si la proposition de loi est votée à la Chambre des représentants, elle devra alors franchir l'étape du Sénat où son avenir n'est toutefois pas garanti.
Avec AFP