Selon des statistiques de la police, le nombre de cas de violences sexuelles a doublé en un an dans ce pays ouest-africain de 7,5 millions d'habitants, passant de 4.750 en 2017 à plus de 8.500 l'an dernier.
"Je déclare le viol et la violence sexuelle urgences nationales", a solennellement affirmé depuis le palais présidentiel M. Bio, confirmant une promesse faite en décembre et retenant visiblement ses larmes après avoir écouté le témoignage d'une survivante de l'épidémie de fièvre Ebola ayant subi plusieurs viols.
"Avec effet immédiat, les pénétrations sexuelles sur mineurs (le terme juridique en vigueur, NDLR) sont punissables de la prison à vie", a déclaré le chef de l'Etat, alors que le code pénal actuel prévoit des peines de cinq à 15 années de réclusion. L'âge de la majorité est fixé à 18 ans dans le pays.
"Tous les hôpitaux publics devront prodiguer des traitements médicaux gratuits et délivrer des certificats médicaux à toutes les victimes", a ajouté le président, au pouvoir depuis 10 mois.
Il a également ordonné la création d'unités spécialisées au sein de la police et la désignation de magistrats spéciaux pour accélérer le traitement des affaires, ainsi que le lancement d'un numéro vert.
"Des milliers de survivants ont été privés de justice et sont traumatisés", a-t-il souligné.
L'opinion avait été choquée fin 2018 par le viol extrêmement violent d'une fillette de cinq ans, atteinte à la colonne vertébrale pendant son agression et qui risque de ne jamais pouvoir remarcher.
Selon l'association d'aide aux victimes Rainbo Initiative, qui a étudié un panel de 30.000 femmes et jeunes filles victimes de viol ou d'agression sexuelle, 93% d'entre elles avaient moins de 17 ans et certains bébés étaient âgés de sept mois à peine.
Sur les 3.137 cas traités par l'ONG, seuls 1,2% ont abouti à une condamnation. Plus de 600 des victimes sont tombées enceintes et 2.404 ont été contaminées par des maladies sexuellement transmissibles, dont sept par le VIH, selon un rapport de l'association.
En décembre, des centaines de personnes avaient manifesté à Freetown pour protester contre la "culture du viol" dans ce pays où, selon les Nations Unies, plus de 60.000 femmes ont été violées pendant la guerre civile, qui a fait quelque 120.000 morts entre 1991 et 2002.