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La Turquie passe à l'attaque contre le groupe Etat islamique


Des tanks turcs prés de la frontière syrienne, 23 juillet 2015
Des tanks turcs prés de la frontière syrienne, 23 juillet 2015

La Turquie s'est résolument engagée dans la lutte contre le groupe Etat islamique (EI) en menant vendredi ses premières frappes aériennes contre des positions jihadistes en Syrie, alors que la police a mené un vaste coup de filet antiterroriste dans tout le pays.

Quatre jours après l'attentat suicide meurtrier attribué à l'EI qui a visé la ville frontalière de Suruç (sud), trois chasseurs F16 de l'armée de l'air turque ont bombardé plusieurs positions tenues par le mouvement radical sur le territoire syrien, face à la ville turque de Kilis (sud).

"L'opération menée contre l'EI a rempli son objectif et ne s'arrêtera pas", a affirmé devant la presse le Premier ministre Ahmet Davutoglu.

"Ce qui s'est passé depuis quelques jours montre que la situation n'est plus sous contrôle", a renchéri le président et homme fort du pays, Recep Tayyip Erdogan, "ce n'est pas une opération d'une nuit, elle continuera avec détermination".

Ce premier raid aérien marque un tournant dans la politique syrienne du régime islamo-conservateur turc, longtemps accusé par ses alliés de fermer les yeux, voire de soutenir les organisations radicales en guerre contre le régime de Damas.

Le raid des avions turcs a été ordonné en représailles à l'attaque menée jeudi par un groupe de combattants jihadistes contre un poste avancé de l'armée turque près de Kilis. Un sous-officier turc a été tué et deux autres soldats blessés.

Les frappes turques ont visé trois bâtiments situés jusqu'à 14 km à l'intérieur de la Syrie, dans les districts d'El Tabiye, El Zahiriye et Burgi, a rapporté l'agence progouvernementale Anatolie.

Selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH), les frappes turques ont tué 9 combattants jihadistes.

- Virage turc -

La frontière est restée calme vendredi dans ce secteur, surveillé par d'importants effectifs militaires, a constaté une journaliste de l'AFP. Seuls quelques tirs isolés d'origine inconnue ont été entendus dans la journée côté syrien.

"J'ai entendu les avions cette nuit mais il n'est pas question pour moi de fuir à cause des combats", a déclaré un élu du petit village de Beylerbeyi, Ahmet Sola, 55 ans, "je soutiens l'armée turque donc je reste".

Ankara a toujours démenti toute complaisance envers l'EI mais, depuis l'attentat de Suruç, a clairement intensifié sa lutte contre le groupe jihadiste.

M. Erdogan a confirmé vendredi que son pays avait enfin autorisé les Etats-Unis à mener des raids aériens contre des cibles jihadistes en Syrie ou en Irak depuis plusieurs de leurs bases, dont celle d'Incirlik (sud). "Elles seront utilisées dans un certain cadre", a-t-il précisé, sans toutefois livrer de détails.

Le ministère des Affaires étrangères turc a précisé dans un communiqué que des "aéronefs avec pilote ou sans pilote" y seraient déployés et que la Turquie "participerait aussi à ces opérations" contre les l'EI.

"L'ouverture de la base suggère que la Turquie ne va peut être pas jouer un rôle éminent, même si c'est possible, mais un rôle de soutien plus actif", a commenté Aron Stein, expert au Atlantic Council Rafic Hariri Center de Beyrouth.

La Turquie était jusque-là restée l'arme au pied face à l'EI. Elle avait refusé d'intervenir militairement en soutien aux milices kurdes de Syrie, par crainte de voir se constituer une région autonome qui lui serait hostile dans le nord de ce pays.

- 297 arrestations -

Sur leur propre sol, les autorités turques ont également mené vendredi dans tout le pays un coup de filet inédit contre des membres présumés de l'EI.

La Turquie constitue le principal point de passage des recrues jihadistes vers la Syrie.

Cette opération antiterroriste a également visé l'extrême gauche et, surtout, les rebelles du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), qui ont revendiqué le meurtre de deux policiers en riposte à l'attentat de Suruç.

Selon M. Davutoglu, 297 personnes soupçonnées d'appartenir à un "groupe terroriste" ont été arrêtées dans 16 provinces du pays, dont 37 ressortissants étrangers.

Parmi elles figure Halis Bayancuk, également connu sous le nom d'Abou Hanzala, présenté par l'agence Anatolie, comme un responsable du groupe Etat islamique (EI) à Istanbul.

Une militante marxiste a également été tuée par la police à Istanbul, selon les médias.

L'attentat suicide de Suruç, qui a fait 32 morts et une centaine de blessés parmi des militants de la cause kurde, a ravivé la colère de la communauté kurde de Turquie, qui a dénoncé la duplicité du gouvernement turc.

Une organisation proche du PKK a affirmé avoir tué mardi soir à Istanbul un commerçant présenté comme un membre du groupe EI. Ces opérations attisent le risque d'un débordement en Turquie de la guerre qui oppose les milices kurdes aux jihadistes sur le sol syrien.

Comme presque chaque jour depuis lundi, une manifestation contre l'EI et la politique syrienne de M. Erdogan a été violemment dispersée par la police vendredi soir à Istanbul.

Des milliers de personnes sont attendues dimanche après-midi dans la plus grande ville de Turquie pour une "marche pour la paix", à l'appel du principal parti kurde de Turquie.

Avec AFP

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