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Le 11 septembre 2001 s'est levée une tempête qui va souffler encore longtemps


Des visiteurs au monument du 11 septembre, le 10 septembre 2016, à New York.
Des visiteurs au monument du 11 septembre, le 10 septembre 2016, à New York.

Si elles n'ont pas, comme l'espéraient ses instigateurs, mis l'Amérique à genoux, les attaques du 11 septembre 2001 ont ouvert une ère d'instabilité dont les répercussions, surtout au Proche et Moyen Orient, vont encore se faire sentir pendant des années, estiment experts et officiels.

En réagissant avec une "force écrasante" (la doctrine US de "l'overwhelming force"), et surtout en envahissant l'Irak, les États-Unis ont semé les germes du chaos dans lequel une bonne partie de la région est actuellement plongée, assurent-ils.

Le réseau Al Qaïda et le mouvement jihadiste international, un temps déstabilisé par la perte de son sanctuaire afghan, a depuis fait la preuve de sa résilience et de sa capacité d'adaptation, essaimant dans de nombreux pays et menant des opérations et des attentats qui sèment la terreur.

"Le 11 septembre était en fait l'aboutissement d'un travail de plusieurs années par Al Qaïda pour monter le +big one+, l'attentat majeur", rappelle à l'AFP Didier Le Bret, qui était jusqu'à la semaine dernière le Coordinateur national du renseignement français, avant de démissionner pour se lancer en politique. "Mais c'est surtout le point de départ de la prise de conscience (des Américains) de leur vulnérabilité sur leur sol. Et ça, ils ne peuvent l'accepter."

"Ils réagissent à l'Américaine, c'est-à-dire pas dans la demi-mesure", poursuit-il. "C'est leur force et leur faiblesse : ils ne cherchent jamais à maintenir, comme nous pouvons le faire en Europe, les équilibres et la complexité des choses. Eux, c'est : voilà l'ennemi, on va se donner les moyens de l'abattre. Les conséquences, on verra..."

"Et on les a vues, effectivement: c'est l'image atroce qu'ont projeté les Etats-Unis d'eux-mêmes, la prison d'Abou Ghraib, Guantanamo. Cela se termine avec l'erreur tragique de l'Irak. Une guerre inachevée, bâtie sur un mensonge (...) . Ils ont précipité le chaos dans la région, qui a été totalement déstabilisée."

Pour Jean-Pierre Filiu, professeur des universités à Sciences-Po Paris, "les quinze ans écoulés depuis le 11 septembre 2001 laissent le sentiment d'un effroyable gâchis".

"Califat de la terreur"

"Les Etats-Unis avaient bénéficié d'une solidarité internationale sans précédent dans la campagne menée contre les talibans et Al-Qaïda", dit-il. "Mais après cette campagne, couronnée de succès en quelques semaines, les néo-conservateurs ont imposé les priorités d'une +guerre globale contre la terreur+ qui a relancé le jihad global et lui a ouvert les portes de l'Irak, et donc du Moyen-Orient, voire de l'Europe".

"Daech, le bien mal-nommé +Etat islamique+, est né de cette alliance entre deux totalitarismes, celui d'Al-Qaïda et celui du régime déchu de Saddam Hussein. Au lieu de prendre la mesure de cette menace inédite, Barack Obama l'a trop longtemps niée, permettant l'émergence d'un +califat de la terreur+ qui a essaimé dans le monde entier", ajoute-t-il.

Avec le recul, il est apparu clairement que l'espoir secret d'Oussama ben Laden était d'attirer la grande Amérique sur son terrain pour une confrontation qui ne pouvait, selon lui, que tourner à son avantage, comme il était persuadé (à tort, assurent tous les experts) d'avoir avec ses combattants arabes chassé l'armée rouge d'Afghanistan.

"Le rêve de mon père était de faire venir les Américains en Afghanistan", a déclaré en 2010 au magazine Rolling Stone, Omar ben Laden, l'un des onze fils du fondateur d'Al Qaïda. "Il voulait leur faire la même chose qu'aux Russes. J'ai été surpris qu'ils mordent à l'appât".

En forçant Washington à sortir de son isolement outre-atlantique et à envoyer des milliers de soldats au Moyen-Orient, où quinze ans plus tard ils sont encore, ben Laden a utilisé ce que l'historien Yuval Noah Harari, auteur du bestseller "Sapiens", appelle "la méthode du maître de taï-chi".

"Les terroristes espèrent que, même s'ils ne peuvent qu'à peine entamer la puissance de leur ennemi, la peur et la confusion va amener cet ennemi à faire un mauvais usage de sa force", écrit-il dans une récente tribune.

"Ils calculent que quand leur ennemi, fou de rage, va utiliser sa puissance massive contre eux, cela fera se lever une tempête militaire et politique beaucoup plus violente que tout ce qu'ils pourraient provoquer eux-mêmes. Et pendant une tempête, bien des choses inattendues arrivent".

Avec AFP

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