La communauté internationale, présente militairement avec la force française Barkhane, qui a succédé à l'opération Serval, déclenchée en 2013 contre les jihadistes, et avec les Casques bleus de l'ONU, attend du vainqueur une relance de l'accord de paix signé en 2015 par le camp gouvernemental et l'ex-rébellion à dominante touareg, dont l'application accumule les retards.
Malgré cet accord, les violences jihadistes ont non seulement persisté, mais se sont propagées du nord vers le centre et le sud du Mali, puis au Burkina Faso et au Niger voisins, se mêlant souvent à des conflits intercommunautaires.
Soumaïla Cissé, qui a recueilli le 29 juillet 17,8% des voix, contre 41,42% pour Ibrahim Boubacar Keïta, dit "IBK", selon des résultats officiels proclamés jeudi soir lors d'une annonce impromptue, a dénoncé vendredi devant ses militants des résultats "ni sincères, ni crédibles".
"Nous ne les accepterons pas!", a lancé l'ancien ministre des Finances, se gardant toutefois d'annoncer des recours devant la Cour constitutionnelle. M. Cissé a appelé les 22 candidats éliminés à constituer autour de lui un "large front démocratique contre la fraude" et pour l'alternance.
Estimant que "le camp du changement est désormais majoritaire", celui qui affrontera de nouveau le 12 août M. Keïta au second tour, comme en 2013, a jugé la victoire "à portée de main" si l'opposition "se rassemble".
Il a déjà reçu une fin de non-recevoir de la seule femme candidate, Djénéba N'Diaye, qui a obtenu 0,36% des voix et s'est ralliée au président sortant dans la matinée.
>> Lire aussi : "IBK" largement en tête, le chef de l'opposition tente de mobiliser au Mali
Soumaïla Cissé s'est aussi inquiété de la fermeture jeudi par les autorités de la radio Renouveau FM en raison d'une virulente chronique de son animateur vedette, l'activiste contestataire Ras Bath. "Cela montre ce que pourrait être un deuxième mandat. Que Dieu nous en garde", a-t-il dit.
- Intervention attendue d'IBK -
Le candidat arrivé troisième, avec 7,95%, l'homme d'affaires Aliou Boubacar Diallo, a annoncé, malgré cette "prouesse" pour sa toute première participation, son intention de saisir la Cour constitutionnelle.
Il a dénoncé "le bourrage des urnes dans certaines localités, leur enlèvement illégal ailleurs, la violation de la procédure de dépouillement dans de nombreux bureaux de vote, l'achat massif des consciences ou encore les plus de 200.000 bulletins déclarés nuls". "Nous allons saisir la justice", a confirmé son porte-parole, Cheikh Oumar Diallo.
Enfin, le positionnement de l'ancien Premier ministre de transition (avril-décembre 2012), Cheick Modibo Diarra, arrivé quatrième avec 7,46%, loin devant les 20 autres candidats, sera très attendu.
"Grâce à vous, je suis en tête", s'est félicité sur le compte Twitter de sa campagne le président sortant, qui devrait s'exprimer publiquement en fin d'après-midi.
"IBK est malgré tout est favori", a confirmé Mamadou Samaké, sociologue et enseignant à l'université de Bamako, soulignant ses réalisations dans le domaine social et de la construction de routes.
"Les alliances du second tour ont commencé. Mais il faut huit points à IBK" pour atteindre la majorité absolue, a-t-il souligné, alors que pour l'emporter, Soumaïla Cissé devra faire le plein des voix des autres candidats et mobiliser très largement ses partisans.
La participation a été de 43,06%, un taux plutôt supérieur à la moyenne habituellement observée dans ce vaste pays d'Afrique de l'Ouest connu pour son rayonnement culturel mais où moins d'un tiers des plus de 15 ans sont alphabétisés.
Elle a été affectée par une série d'attaques jihadistes présumées qui ont perturbé le vote dans plus de 700 bureaux sur quelque 23.000, essentiellement dans des zones rurales du centre, malgré la mobilisation de plus de 30.000 membres des forces de sécurité, nationales et étrangères.
Le moment de l'annonce, à la veille du dernier jour légal pour la proclamation des résultats, a surpris les Maliens.
"Quand j'ai vu les résultats, ça m'a touché. Ils nous ont menti, c'est très grave. Il va falloir redoubler d'efforts", expliquait, mi-amer, mi-combatif, Mamadou Bollo, venu assister à la déclaration de Soumaïla Cissé.
Une source au ministère de l'Administration territoriale a indiqué vendredi que les résultats ne seraient pas publiés "bureau par bureau", contrairement aux demandes répétées de l'opposition et des observateurs européens.
Avec AFP