Ce milliardaire âgé de 68 ans a obtenu 54,58% des suffrages du deuxième tour contre 45,42% pour son adversaire de centre-gauche, le sénateur Alejandro Guillier, qui a reconnu sa défaite.
Cet écart est plus important que ne le prédisaient les instituts de sondage et il marque aussi la plus large défaite jamais subie par la coalition de centre-gauche qui a dominé la vie politique chilienne depuis la fin de la dictature d'Augusto Pinochet.
Sebastian Piñera, qui a obtenu plus de voix que n'importe quel autre président depuis le rétablissement de la démocratie en 1990, a exploité les divisions apparues tout au long de la campagne au sein de la gauche pour attirer les électeurs centristes avec ses promesses de baisses d'impôts pour les entreprises, de doublement de la croissance économique et d'éradication de la pauvreté.
"Malgré nos grandes différences, il y a de grands points d'accord", a-t-il dit au sujet de son adversaire devant la foule de ses partisans agitant des drapeaux chiliens dans le centre de Santiago.
Dans les rues des quartiers aisés de la capitale chilienne, où Sebastian Piñera a recueilli environ 90% des voix, les habitants ont laissé éclater leur joie avec des concerts de klaxon.
Alejandro Guillier a pour sa part reconnu une "dure défaite" tout en félicitant son adversaire pour son "triomphe massif et sans appel". Il a invité ses partisans à défendre l'héritage progressiste de la présidente sortante Michelle Bachelet.
Alors qu'aucun des deux candidats n'entendait remettre en cause le modèle libéral du Chili, premier producteur mondial de cuivre, de nombreux Chiliens ont perçu cette élection comme un référendum sur le bilan de Michelle Bachelet, qui s'est efforcée de réduire les inégalités via notamment une réforme des études supérieures et de la fiscalité.
"PERFECTIONNER" LES RÉFORMES
Alejandro Guillier, candidat sous la bannière de la coalition Nueva Mayoria de Michelle Bachelet, avait déjà réalisé au premier tour le plus faible score d'un candidat de centre gauche depuis le retour de la démocratie, signe du large mécontentement de l'opinion contre la présidente sortante.
Une partie de l'électorat de gauche juge la politique sociale de Michelle Bachelet trop timide, tandis que pour l'opposition conservatrice, les mesures qu'elle a prises ont entretenu l'incertitude sur les marchés financiers et nui aux investissements privés, si bien que la croissance économique moyenne a été seulement de l'ordre de 1,8% par an sous sa présidence.
Sebastian Piñera s'est pour sa part efforcé durant la campagne de dépeindre Alejandro Guillier comme un candidat extrémiste dans un pays réputé pour sa modération depuis le retour à la démocratie, en comparant cet ancien journaliste de radio et de télévision au président socialiste du Venezuela Nicolas Maduro.
Il pourrait néanmoins avoir lui-même du mal à mettre en oeuvre son programme comme le montrent les difficultés auxquelles se heurtent ses alliés idéologiques au Brésil ou en Argentine pour appliquer des mesures d'austérité budgétaire via des baisses des dépenses publiques.
Alejandro Guillier a bénéficié durant l'entre deux-tours du ralliement de la candidate de la gauche antilibérale Beatriz Sanchez, qui, sous les couleurs de la coalition Frente Amplio, a recueilli environ 20% au premier tour. Le report des voix ne semble pas avoir pleinement fonctionné alors que, durant le dernier mandat de Michelle Bachelet, la gauche s'est divisée sur le droit à l'avortement ou le renforcement du poids des syndicats.
Face à ces divisions, Sebastian Piñera a promis de "perfectionner" les réformes mises en oeuvre par la présidente sortante en matière de fiscalité et d'emploi, de réduire le poids de l'administration et de garantir un soutien financier stable à la compagnie minière publique Codelco COBRE.UL . Sa cérémonie d'investiture est prévue le 11 mars.
Avec Reuters