Pour le sixième mois d'affilée, le déficit commercial américain s'est inscrit en hausse (+1,6%) pour s'établir à 57,6 milliards de dollars, malgré les velléités du président américain de le réduire drastiquement.
Si les exportations de biens et services ont atteint un niveau record en février à 204,4 milliards de dollars, elles sont restées largement inférieures aux importations de biens et services (262 milliards), qui constituent aussi un record absolu.
Le déficit des seules marchandises (75,9 mds USD) a, lui, atteint son plus haut niveau depuis juillet 2008 malgré un net infléchissement du déficit avec la Chine, au coeur d'une escalade des tensions entre Washington et Pékin.
Le déficit des marchandises avec le géant asiatique a en effet chuté de 18,6% à 29,3 milliards de dollars, avec des importations en baisse de 14,7% et des exportations stables.
- Effet des JO d'hiver -
Cette baisse n'est toutefois pas de nature à changer la tendance de fond puisque depuis le début de l'année, le déficit des biens avec Pékin a bondi de 20,2%.
Ces données sont publiées après de nouvelles frictions cette semaine entre les Etats-Unis et la Chine sur le commerce.
"Nous estimons que ce déficit est tiré par des pratiques commerciales déloyales", a martelé jeudi Peter Navarro, l'un des conseillers économiques de la Maison Blanche, reprenant le leitmotiv du président américain. "Ce n'est pas viable", a-t-il ajouté sur CNBC.
Donald Trump, qui accuse aussi la Chine de "transfert forcé" de technologie américaine ou de "vol" de propriété intellectuelle, avait publié mardi une liste provisoire de produits importés de Chine susceptibles d'être soumis à de nouveaux droits de douane.
Pékin a aussitôt répliqué avec sa propre liste visant des importations stratégiques en provenance des Etats-Unis (soja, produits des secteurs aéronautique et automobile) du même montant annuel : 50 milliards de dollars.
Le ministre chinois des Affaires étrangères Wang Yi a appelé jeudi la communauté internationale à faire front uni contre Washington. "Si les Etats-Unis pensent qu'ils peuvent tirer profit du protectionnisme, ils se trompent", a-t-il déclaré depuis Moscou.
Pour l'heure, les mesures drastiques annoncées par Washington et Pékin ne sont effectives ni d'un côté, ni de l'autre, mais elles suscitent une crainte d'une véritable guerre commerciale aux conséquences potentiellement négatives non seulement pour les économies de ces deux premières puissances du monde mais encore pour l'expansion mondiale.
Malgré le creusement du déficit en février, les économistes ont estimé que les données du commerce n'étaient pas si mauvaises que cela, relevant l'impact des droits payés par les Etats-Unis pour retransmettre les jeux olympiques d'hiver.
"Tous les deux ans, les JO entraînent un pic des importations de services qui sont effacées le mois suivant. Sans cet effet, le déficit commercial aurait été globalement similaire à celui de janvier (56,6 mds USD)", ont ainsi expliqué les analystes d'Oxford Economics.
Issue imminente pour l’Aléna ?
Par répartition géographique, le déficit des biens avec le Mexique a bondi de 46,6% à 6,1 milliards. En revanche, le déficit des biens avec le Canada a chuté de 89,6% à 400 millions en février.
Le déséquilibre des échanges commerciaux avec Mexico est également dans le viseur de Donald Trump qui a imposé la renégociation du traité de libre-échange nord-américain (Aléna) qui unit les Etats-Unis, le Mexique et le Canada depuis 1994.
Après près de huit mois de tractations et de profonds points de discorde, le Premier canadien Justin Trudeau a évoqué jeudi une "grande possibilité" que les trois partenaires puissent s'entendre dans les prochains jours sur les grandes lignes d'un Aléna renégocié qui serait "gagnant-gagnant-gagnant".
"Si l'on pouvait annoncer quelque chose au sommet des Amériques", les 13 et 14 avril au Pérou, "ce serait très bien", a-t-il ajouté. "On voit clairement l'occasion d'avancer pour renforcer l'Amérique du nord comme espace de commerce uni sous l'Aléna, c'est très positif".
Avec l'Union européenne, autre partenaire commercial sous la pression des Etats-Unis, le déficit a diminué de 11,5% à 12 milliards.
Washington a imposé le 8 mars des droits de douanes de 25% sur les importations d'acier et de 10% sur celles d'aluminium. L'Union européenne en a été provisoirement exemptée. Les deux parties sont en discussions, Donald Trump exigeant des 28 pays membres qu'ils ouvrent davantage leur marché aux produits américains.
Avec AFP