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Le Giec appelle à des transformations "sans précédent" pour limiter le réchauffement climatique


Laurent Fabius, le président de la COP21, juste après avoir prononcé l'adoption de l'accord de Paris sur le climat, le 12 décembre 2015. (REUTERS/Stephane Mahe)
Laurent Fabius, le président de la COP21, juste après avoir prononcé l'adoption de l'accord de Paris sur le climat, le 12 décembre 2015. (REUTERS/Stephane Mahe)

Le monde devra engager des transformations "rapides" et "sans précédent", s'il veut limiter le réchauffement climatique à 1,5°C, soulignent les experts climat de l'ONU (Giec), mettant en garde contre des risques accrus au-delà de ce seuil.

Dans un rapport de 400 pages, dont le "résumé à l'intention des décideurs politiques" a été publié lundi, les scientifiques exposent les nombreux impacts déjà à l'œuvre, et notamment la menace d'emballement au-delà d'1,5°C de réchauffement (par rapport aux niveaux préindustriels) : vagues de chaleur, extinctions d'espèces, ou déstabilisation des calottes polaires, source de montée des océans sur le long terme.

"Chaque petit accès de réchauffement supplémentaire compte, d'autant que passer 1,5°C accroît le risque de changements profonds voire irréversibles, comme la perte de certains écosystèmes", explique Hans-Otto Pörtner, co-président de cette session du Giec qui a réuni chercheurs et représentants des Etats toute la semaine dernière en Corée du sud.

Si le mercure continue de grimper au rythme actuel, sous l'effet des émissions de gaz à effet de serre, il devrait atteindre +1,5°C entre 2030 et 2052, note le rapport, basé sur plus de 6.000 études. Et si les Etats s'en tiennent à leurs engagements de réduction d'émissions pris dans le cadre de l'accord de Paris en 2015, ce sera +3°C à la fin du siècle.

Alors que faire, tandis que 2017 a encore vu les émissions mondiales liées à l'énergie repartir à la hausse ?

Pour le Giec, pour rester à 1,5°C, les émissions de CO2 devront chuter drastiquement dès avant 2030 (-45% d'ici 2030) et le monde atteindre une "neutralité carbone" en 2050 (autrement dit il faudra cesser de mettre dans l'atmosphère plus de CO2 qu'on ne peut en retirer).

"Faisabilité"

Villes, industries, énergie, bâtiment... tous les secteurs sont appelés à s'atteler à de "profondes réductions d'émissions” : rester à 1,5°C demandera "une transition rapide" et d'une ampleur "sans précédent".

Le Giec insiste sur l'énergie - charbon, gas, pétrole étant responsables des trois quarts des émissions. Et propose plusieurs scénarios chiffrés incluant différentes combinaisons d'actions.

"Le rapport donne aux décideurs politiques l'information qu'il leur faut pour prendre des décisions tout en considérant aussi les besoins des populations", explique la sud-africaine Debra Roberts, autre coprésidente de cette réunion. "Les années à venir seront les plus déterminantes de notre histoire", estime-t-elle.

Pour la climatologue Valérie Masson-Delmotte, également à Incheon, c'est "un constat lucide et difficile : la politique des petits pas ça ne suffit pas".

"Il nous dit 'si on n'agit pas maintenant, on va vers un monde où on sera en permanence en gestion de crises'", dit-elle. "Il y a des actions en cours dans le monde, mais il faudrait les accélérer. La vraie question de la faisabilité c'est celle-là : les gens sont-ils prêts à agir, et y aura-t-il assez de volonté politique collective ?”

"Nous avons cherché à voir si les conditions nécessaires pour tenir 1,5°C étaient réunies", résume Jim Skea, de l'Imperial College de Londres. "Et oui, les lois de la physique et de la chimie le permettent, ainsi que les technologies, le changement des modes de vie et les investissements. La dernière chose, à laquelle les scientifiques ne peuvent répondre, c'est si c'est faisable politiquement et institutionnellement. Nous avons remis le message aux gouvernements, nous leur avons donné les preuves, à eux de voir".

L'Alliance des petits Etats insulaires, à la pointe du combat pour inscrire l'objectif 1,5 dans l'accord de Paris, a appelé lundi "les nations civilisées à prendre leurs responsabilités en relevant leurs efforts pour réduire les émissions".

"Le rapport montre que nous n'avons plus qu'une occasion, des plus minces, pour éviter des dommages impensables au système climatique qui nous fait vivre", a dit Amjad Abdulla, "convaincu que les historiens regarderont ces conclusions comme un moment clé dans l'histoire des hommes".

"Y arriverons-nous à temps? Personne ne sait", dit Kaisa Kosonen, reponsable climat pour Greenpeace. "Ce qui compte maintenant est que nous décidions d'essayer et que nous en fassions notre priorité. Seulement alors aurons-nous une chance de nous protéger des impacts que la science nous annonce."

Le nouveau coup de semonce du Giec

En théorie, contenir l'emballement climatique qui nous guette est encore possible, mais en pratique ? Le monde doit engager des transformations "rapides" et "sans précédent", s'il veut limiter le réchauffement à 1,5°C, une cote d'alerte qui pourrait être atteinte dès 2030, préviennent les experts climat de l'ONU.

"C'est de l'urgence extrême", a réagi depuis Genève le secrétaire général de l'Organisation météorologique mondiale (OMM) Petteri Taalas: "Nous nous dirigeons plutôt vers +3 à 5°C en ce moment". Le Brésil, premier pays forestier, un favori à la présidentielle n'inclut dans son programme ni déforestation ni climat.

"Neutralité carbone" en 2050

Pour le Giec, pour rester à 1,5°C, les émissions de CO2 doivent chuter bien avant 2030 (-45% d'ici 2030) et le monde atteindre une "neutralité carbone" en 2050 : autrement dit il faudra cesser de rejeter dans l'atmosphère plus de CO2 qu'on ne peut en retirer.

"Il n'y a pas de temps à perdre", a prévenu le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres sur Twitter. "Il n'est pas impossible de limiter le réchauffement climatique à 1,5°C, nous dit le rapport du Giec. Mais il faudra une action urgente, collective, et sans précédent dans tous les secteurs".

"Les années à venir seront les plus déterminantes de notre histoire", explique à l'AFP la Sud-Africaine Debra Roberts, coprésidente du Giec.

Aux politiques de jouer

"Nous avons cherché à voir si les conditions pour tenir 1,5°C étaient réunies", a résumé Jim Skea, de l'Imperial College de Londres, à Incheon.

"Et oui, les lois de la physique et de la chimie le permettent, ainsi que les technologies, le changement des modes de vie et les investissements. La dernière chose, à laquelle les scientifiques ne peuvent répondre, c'est si c'est faisable politiquement et institutionnellement."

Ce rapport avait été commandé par l'ONU en vue du processus de révision des engagements nationaux, qui sera lancé aux négociations climat en décembre en Pologne (COP24).

"Nous devons renforcer nos ambitions conformément aux conclusions du Giec", a tweeté le commissaire européen à l'énergie Miguel Arias Canete.

Le Conseil environnement de l'UE se réunit mardi avec, à l'agenda, les émissions des véhicules et la COP24.

"Nous allons nous mobiliser auprès de nos voisins européens pour revoir à la hausse les engagements de la COP21", a déclaré le ministre français de la Transition écologique, François de Rugy. "Nous ne devons réussir à prendre congé du charbon, du pétrole et du gaz," a abondé son homologue allemand, Svenja Schulze.

L'Alliance des petits Etats insulaires, à la pointe du combat pour inscrire dans l'accord de Paris l'objectif 1,5°, et pas seulement 2°C, a exhorté "les nations civilisées à prendre leurs responsabilités".

Avec AFP

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