La rencontre entre des responsables du gouvernement, le Nigeria Labour Congress (NLC) et le Trade Union Congress (TUC), les deux principaux syndicats nationaux, devait débuter dans la soirée à Abuja.
NLC et TUC ont appelé à une grève nationale illimitée à compter de mercredi, jusqu'à ce que le prix de l'essence à la pompe, 145 nairas (0,64 euro) le litre, soit abaissé à 86,50 nairas (0,38 euro).
Deux annonces faites dans la journée n'ont pas arrangé les choses, n'augurant en rien d'une future baisse des prix. Dans un premier temps, le bureau national des Statistiques a en effet indiqué que l'inflation avait encore augmenté (+13,7% en avril contre +12,8% en mars).
Le sous-secrétaire d'Etat au Pétrole Emmanuel Kachikwu a par ailleurs déclaré que la production nigériane avait encore baissé : "Nous produisons environ 1,4 million de barils par jour", a-t-il annoncé lundi devant le Parlement. La production nationale atteint ainsi son plus bas depuis 1994. Ces dernières années, elle fluctuait plutôt entre 1,8 et deux millions de barils par jour.
La hausse du prix de l'essence est "absolument essentielle" pour relancer la croissance, améliorer la confiance des investisseurs et même pour la "survie" du Nigeria, a ajouté le sous-secrétaire d'Etat.
Administrations, aéroports, ports, banques, magasins et marchés devraient être affectés par le mouvement de grève si les négociations échouent, ont prévenu les syndicats, qui ont conseillé à la population de faire des provisions.
Le Nigeria, première puissance économique du continent, traverse une grave crise économique et financière causée par la chute mondiale des cours de pétrole, principale source de revenus de l'Etat et de réserves en devises.
Bien que premier producteur de pétrole du continent africain, le Nigeria est contraint d'importer des produits pétroliers, ses quatre raffineries ne suffisant pas à sa consommation.
Le gouvernement maintenait, jusqu'ici, un prix à la pompe assez bas et payait la différence aux importateurs, qui prenaient régulièrement le pays en otage en refusant de distribuer le carburant tant qu'ils n'avaient pas touché les subventions de l'Etat.
Pendant des mois, des files d'automobilistes de plusieurs kilomètres se sont formées aux pompes, tandis que d'autres habitants se rabattaient sur le marché noir où le prix du litre pouvait être multiplié par trois.
Le gouvernement a pris la décision, la semaine dernière, de mettre fin aux subventions et de déréguler l'importation de carburant.
En janvier 2012, le gouvernement avait tenté de mettre fin à ces subventions, ce qui avait fait doubler les prix. Les violentes manifestations de dizaines de milliers de personnes, qui ont fait une dizaine de morts, l'avaient ensuite obligé à renoncer à cette mesure.
Aujourd'hui, le gouvernement se défausse sur les importateurs, dans l'incapacité de se procurer des devises étrangères au cours légal. Au Nigeria, le taux officiel tourne en effet autour de 197 à 199 nairas pour un dollar, tandis que sur le marché noir, répandu dans le pays, son cours atteint des sommets, jusqu'à 350 nairas pour un dollar.
Pour plusieurs experts, même s'il était maintenu par les syndicats, l'appel à la grève pourrait ne pas être suivi avec la même ferveur qu'en 2012.
Le NLC "devrait se rendre compte que le Nigeria est déjà complètement à terre et qu'on ne peut pas se permettre une grève, qui risque d'accentuer les problèmes économiques à cette période", estime Sola Oni, courtier pour la société Sofunix.
"De plus, ce nouveau prix (de l'essence) va permettre de mettre fin à un système frauduleux de subventions, qui n'a permis d'enrichir qu'une minorité de Nigérians", a-t-il ajouté.
Pour l'expert Quincy Durodola, les syndicats feraient mieux de soutenir les initiatives du gouvernement qui encouragent la transparence dans le secteur pétrolier plutôt que de créer une grève "inutile".
Avec AFP