"Des terroristes criminels ont assassiné samedi au moins vingt civils dans plusieurs hameaux de la commune d'Anchawadj", à quelques dizaines de kilomètres au nord de Gao, a assuré par téléphone à l'AFP un responsable de la police de la région sous couvert d'anonymat.
Un autre responsable policier à Bamako, également sous couvert de l'anonymat, a confirmé à l'AFP "l'assassinat samedi d'une vingtaine de civils à Ebak à 35 km au nord de Gao, et dans des localités voisines", évoquant "un acte perpétré par des criminels armés".
"Les jihadistes ont assassiné samedi 24 civils dans la commune de Anchawadj. C'est la panique générale", a pour sa part affirmé une autorité locale à l'AFP.
Le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, a condamné "fermement" cette attaque, dans un communiqué. Il "rappelle que les attaques visant les Casques bleus peuvent constituer des crimes de guerre au regard du droit international et que leurs auteurs sont passibles de poursuites".
Aucune autre source n'a confirmé que les jihadistes étaient les auteurs des attaques. Mais dans cette immense région sahélienne, les attaques des jihadistes affiliés au groupe Etat islamique au grand Sahara (EIGS) sont de plus en plus fréquentes et leur champ d'action s'élargit.
Les maigres informations remontant de cette zone reculée et difficilement accessible font état de centaines de civils tués et de milliers de déplacés ces derniers mois dans les régions de Ménaka, près de la frontière avec le Niger, et de Gao plus à l'ouest.
Mercredi, le mouvement pour le salut de l’Azawad (MSA), un des groupes luttant contre les jihadistes, a assuré que 22 personnes avaient été tuées par "des hommes armés" dans la localité d'Izingaz, dans la région de Ménaka. Aucune autre source n'a confirmé ou infirmé l'information.
"Menace terroriste"
L'élu de la région de Gao a décrit dimanche à l'AFP "une situation très préoccupante dans la commune d'Anchawadj" avec de nombreux civils fuyant les exactions "des jihadistes" dans les villages voisins. "Une bonne partie de la région de Gao et de celle de Ménaka", sont "occupées par des jihadistes", a-t-il poursuivi. "L'Etat doit faire quelque chose".
Cette région est le théâtre de violences depuis le début du conflit en 2012, quand des groupes armés rebelles s'étaient levés contre Bamako. Ils ont signé en 2015 un accord de paix avec le Mali, qui peine toujours à être appliqué.
Outre ces groupes armés, des mouvements jihadistes – affiliés à Al-Qaïda et à l'organisation Etat islamique – opèrent dans la zone, combattant contre les symboles de l'Etat, ceux qu'ils accusent de le soutenir, ainsi qu'entre eux pour le contrôle des territoires. Des trafiquants et autres bandits sont également présents dans cette région désertique où l'Etat est presque inexistant.
La situation sécuritaire s'est récemment "fortement détériorée" dans la région de Gao, et de Ménaka, a indiqué dans son dernier rapport le Secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres. La "menace terroriste continue de (s'y) étendre", a-t-il déploré en s'inquiétant de "l’absence d’une présence soutenue des forces de sécurité et de l’administration publique dans ces zones".
Casque bleu tué
Sont basés à Gao des militaires maliens, des Casques bleus de la Mission de l'ONU au Mali (Minusma, 13.000 soldats) ainsi que des soldats français de l'opération Barkhane.
Ces derniers, qui ont entamé un retrait progressif du Mali au début de l'année, doivent définitivement quitter la base de Gao, dernière enclave où ils sont encore présents au Mali, "à la fin de l'été", selon l'état-major français.
Dimanche dans la matinée, un Casque bleu guinéen a été tué dans l'explosion d'une mine à Kidal, plus au nord, alors qu'il participait à une patrouille de sécurité dans une opération de recherche et de détection de mines, selon la Minusma.
Ce nouveau décès intervient dans un contexte tendu de négociations sur le renouvellement du mandat de la Minusma, la mission de maintien de la paix de l'ONU ayant subi le plus de pertes humaines. Depuis sa création en 2013, 175 de ses Casques bleus sont morts dans des actes hostiles.
Le Mali, pays pauvre et enclavé au coeur du Sahel, a été le théâtre de deux coups d'État militaires en août 2020 et en mai 2021. La crise politique va de pair avec une grave crise sécuritaire en cours depuis 2012 et le déclenchement d'insurrections indépendantiste et jihadiste dans le nord.