Il y a une vingtaine d’années, le people Ogoni a forcé le géant du pétrole Royal Dutch Shell à mettre fin aux forages sur ses terres au Nigéria. Il imputait à ces forages la responsabilité de la pollution croissante de la région. Mais aujourd’hui, certains Ogonis estiment qu’il est temps de reprendre l’exploitation pétrolière.
En 1993, le peuple Ogoni avait dit : « Ça suffit », s’élevant contre l’extraction du pétrole sur ses terres, au motif de la destruction de l'environnement que cela entrainait, ainsi que du manque de partage des richesses de l’or noir.
Le Mouvement pour la survie du peuple Ogoni (MOSOP) était né vers 1990 dans le sud du Nigeria dans le but est de défendre les intérêts du peuple Ogoni face aux abus commis par la Royal Dutch Shell et le gouvernement nigérian. Il s’était fait connaitre par son chef charismatique Ken Saro-Wiwa, qui serait pendu en 1995 sous une dictature militaire, en représailles pour son activisme.
« L’exploration pétrolière a transformé le pays ogoni en immense terrain vague », déclarait Ken Saro-Wiwa, en 1992.
« Les terres, les rivières et les ruisseaux sont en permanence entièrement pollués ; l’atmosphère est empoisonnée, chargée de vapeurs d’hydrocarbures, de méthane, d’oxydes de carbone et de suies rejetés par les torchères qui, depuis trente-trois ans, brûlent des gaz vingt-quatre heures sur vingt-quatre tout près des zones d’habitation. Le territoire ogoni a été dévasté par des pluies acides et des épanchements ou des jaillissements d’hydrocarbures ».
Mais vingt ans après la mort du Prix Nobel alternatif, certains Ogonis pensent qu'il est temps de reprendre la production. Parmi eux, Donald Gberesu, chef de la localité de Kebgara Dere.« Cela va générer des emplois. Cela va certainement intéresser nos jeunes. Et vous savez, là où il y a de l'argent, les gens peuvent avoir accès à une bonne éducation, à une bonne alimentation, ou des logements adéquats » explique Donald Gberesu.
Depuis le départ de Shell, la région est restée polluée. Selon le Programme des Nations Unies pour l’environnement (UNEP), il faudra jusqu’à 30 ans pour nettoyer les dégâts provoqués par l’exploitation pétrolière. Ce qui fait dire à certains Ogonis qu’il faudrait peut-être résoudre cette question avant de relancer la production.
D’autres font valoir qu’elle ne saurait reprendre sans profiter aux populations locales.
« Nous allons procéder à un nouveau départ », explique Gbarakporo Amstel, un habitant de la région « Parce que nous allons négocier. Vous me donnez ce que je veux, et je fais de même ».
Entre-temps, sur le terrain, les courants d’eau restent contaminés par le pétrole, comme c’était le cas dans les années 1990, du temps du militant Saro-Wiva.