La tuerie, dans la soirée du 9 juin, dans ce village de la zone de Bandiagara, a fait 35 morts dont 24 enfants, selon un dernier bilan.
Les violences qui déchirent le centre du Mali ont culminé avec le massacre le 23 mars, attribué à des chasseurs dogons, de quelque 160 Peuls, dans le village d'Ogossagou, près de la frontière avec le Burkina Faso.
Depuis l'apparition en 2015 dans cette région du groupe jihadiste du prédicateur Amadou Koufa, recrutant prioritairement parmi les Peuls, traditionnellement éleveurs, les affrontements se multiplient entre cette communauté et les ethnies bambara et dogon, pratiquant essentiellement l'agriculture, qui ont créé leurs "groupes d'autodéfense".
Le chef de l'Etat a quitté dans la matinée la capitale à la tête d'une "forte délégation" comprenant le cardinal Jean Zerbo, le pasteur Marc Goita et six ministres, selon la présidence.
M. Keïta a écourté une visite officielle à Genève pour rentrer au Mali mardi, le jour où le Premier ministre Boubou Cissé s'est lui-même rendu dans ce village majoritairement chrétien.
La population malienne, toutes communautés confondues, est très majoritairement musulmane.
Lors du Conseil des ministres mercredi, le chef de l'Etat a proclamé un deuil national de trois jours et le gouvernement a révoqué le gouverneur de la région de Mopti (centre), où se concentre l'essentiel des violences dans le pays, le général Sidi Alassane Touré.
Quelques heures auparavant, une nouvelle attaque visant deux villages essentiellement dogons du secteur de Bankass, plus au sud, faisait au moins deux morts et des blessés, selon un élu local et une source de sécurité malienne.
'Cycle infernal'
Lors d'une réunion du Conseil de sécurité mercredi, le chef de la Mission de l'ONU au Mali (Minusma), Mahamat Saleh Annadif, a affirmé que "le cycle infernal de la violence devait être arrêté" afin d'éviter que "chacun ne se fasse justice par lui-même". Il a appelé à "une accélération de la maîtrise de l'action sécuritaire" de la part du gouvernement.
Le ministre malien des Affaires étrangères, Tiébilé Dramé, a pour sa part réclamé "une présence accrue" des Casques bleus de la Minusma dans le centre du pays.
"Cette présence accrue est la condition du succès du processus politique que nous allons engager dans les prochains jours", a ajouté M. Dramé, sans autre précision.
Selon Baba Dakono, chercheur à Bamako pour l'Institut d'études de sécurité sur l'Afrique (ISS), "le désarmement des acteurs non étatiques, qu'ils soient des milices, des groupes d'autodéfense ou même des individus, est indispensable pour pacifier la zone".
Mais "les milices, à tort ou à raison, sont nées pour répondre à un besoin de sécurité des populations, qui n'ont plus ou très peu confiance dans l'efficacité des réponses institutionnelles déployées", a-t-il expliqué à l'AFP après la tuerie de Sobane Da.
Le chef de la diplomatie malienne a également demandé que le renforcement réclamé de la Minusma dans le centre ne se fasse pas "au détriment des régions du Nord", où les opérations militaires, y compris de la force française Barkhane, se poursuivent.
Trois civils maliens, dont un adolescent, ont ainsi été tués le 8 juin par un tir de Barkhane dans la région de Tombouctou (nord-ouest).
L'armée française a affirmé que ses militaires avaient tiré sur "un véhicule suspect qui a refusé de se soumettre à un contrôle" et annoncé l'ouverture d'une enquête. Mais des responsables locaux ont dénoncé une "bavure".
Le nord du Mali était tombé en 2012 sous la coupe de groupes jihadistes, en grande partie dispersés par une intervention militaire lancée en janvier 2013 à l'initiative de la France, qui se poursuit.
Mais des zones entières échappent au contrôle des forces maliennes, françaises et de l'ONU, malgré la signature en 2015 d'un accord de paix censé isoler définitivement les jihadistes.
Depuis 2015, ces violences se sont propagées du Nord vers le centre, voire parfois le Sud. Elles se mêlent très souvent à des conflits intercommunautaires, un phénomène que connaissent également le Burkina Faso et le Niger voisins.