Comment vous sentez vous depuis le rétablissement dans vos fonctions et ces derniers événements ?
Michel Kafando : “Ça a été une épreuve douloureuse d'abord pour ma personne, je vous rassure tout de suite que je n ai pas été molesté. Je n'ai pas subi de sévices. Mais j'en ai souffert moralement parce que là où je pensais qu'au Burkina on avait fini par comprendre que les coups d'Etat ne servent à rien et sont surtout contre l’intérêt des peuples, là où je pensais que cela ne pourrait plus se produire, nous avons vu le contraire.”
Que va t-il advenir du général Diendéré et des autres protagonistes de ce coup d'Etat ?
Michel Kafando : “Mais n'oubliez pas que le général Diendéré, dans l’une de ses déclarations, avait bien dit qu’il était prêt à se soumettre à la justice. Donc très bientôt la justice va se saisir de cette situation là. Maintenant à coté de celà nous avons une commission d’enquête chargée de voir aussi quelles sont les différentes implications dans ce coup d’Etat. Autant nous connaissons les membres de la junte, autant nous ignorons les complicités, surtout les complicités civiles qui ont participé à ce coup. Donc cette commission poursuit son travail. Au total dans un mois je pense que nous serons fixés et nous verrons comment aller à la procédure judiciaire.”
Et quid des autres éléments qui formaient le RSP, ce régiment d’élite ?
Michel Kafando : “A l’heure actuelle nous avons à faire face à beaucoup de défis. Nous avons des défis extérieurs, c'est-à-dire le terrorisme à nos frontières. Donc voilà des gens qui pourront servir dans nos unités déjà positionnées à nos frontières. Nous avons aussi la sécurité intérieure, surtout à l’approche des élections. Donc tout ceci faisant, en dehors de ceux qui seront convaincus d'avoir trempé dans ce coup d’Etat et qui devront répondre devant la justice, ceux-là qui n’ ont vraiment pas pris part à quoique ce soit, seront comme on dit "recasés".
Savez vous quand se tiendront les élections présidentielles, maintenant que la transition a été rétablie ?
Michel Kafando : “Je ne peux pas vous dire maintenant quel sera le chronogramme, forcément il y aura un nouveau chronogramme, parce que vous savez il y a quand même un certain nombre de choses qui se sont produites avec ce coup d'Etat. Nous avons des familles endeuillées, nous n'avons pas encore enterré les victimes qui se trouvent êre essentiellement des jeunes. Nous avons à leur rendre un hommage national, comme il se doit. Nous avons surtout à privilégier la sécurisation. Je ne vous cache pas qu’il y en a certains du RSP qui n’ ont pas encore été arrêtés. On ne sait pas. On en a arreté beaucoup mais il faut être sûr qu’il n’ y en a pas qui se sont évadés avec les armes. Donc tout cela demande à ce qu' il y ait une plus grande sécurisation du Burkina, parce que vous ne pouvez pas aller à des élections dans une confusion, il faut qu’on soit sûr que quand on organise les élections, les bureaux de vote ne seront pas dans l’ insécurité. Donc il y a tout celà à régler. Nous avons aussi le problème de l’ Armée en général, car maintenant il faut que l’Armée nationale devienne vraiment professionnelle. Plus d’immixtion de l’Armée dans la politique, plus d’immixtion d’unités d’élite en dehors de l’Armée nationale. Donc c'est tout celà que nous devons examiner avant d’établir le nouveau chronogramme."
Dernière question, est-ce que ce coup d’ Etat va mettre à nouveau le voile sur l’ enquête concernant la mort de Thomas Sankara ?
Michel Kafando : "La procédure se poursuit. Elle sera certainement d’autant plus intéressante maintenant que tout le monde sait que le général Diendéré a participé à l aventure qui a coûté la vie au président Sankara, donc peut-être que nous aurons aussi de ce côté des données qui vont nous permettre de boucler le dossier Sankara. Nous sommes déterminés et nous continuons dans ce sens."
Propos recueillis par Tatiana Mossot