Esdras Ndikumana, 54 ans, actuellement réfugié au Kenya, se voit ainsi récompensé "pour son parcours qui montre bien ce qu'est le courage et la volonté d'informer", a déclaré à cette occasion le ministre français des Affaires étrangères, Laurent Fabius, lors de ses voeux à la presse dans les salons du Quai d'Orsay.
Attribué pour la première fois à un journaliste étranger, ce prix est aussi "un message de soutien à tous vos confrères burundais et africains qui accomplissent un travail exemplaire", a souligné M. Fabius, rappelant que la France restait "très attentive et inquiète de la situation" au Burundi.
Correspondant de l'AFP à Bujumbura depuis 2001 et de RFI depuis 2002, M. Ndikumana avait dû fuir son pays en août dernier après avoir été arrêté par les services de renseignements burundais, puis frappé et torturé par des membres de ces services.
Considéré comme l'un des meilleurs spécialistes de la région, et un journaliste de référence sur le continent, il avait dû ensuite rapidement quitter le pays par crainte pour sa sécurité. RFI, l'AFP et le journaliste ont déposé plainte contre X au Burundi, plainte depuis lors restée sans suite.
Pays dont l'histoire post-coloniale est marquée par des massacres répétés entre majorité hutu et minorité tutsi, le Burundi connait une gravissime crise politique et menace de sombrer de nouveau dans la guerre civile, après la candidature contestée puis la réélection en juillet du président sortant Pierre Nkurunziza à un troisième mandat.
M. Ndikumana a dit sa "fierté" de recevoir ce prix, une reconnaissance par la profession du travail des correspondants de presse en Afrique".
"Je le dédie à tous mes confrères burundais. Le Burundi était l'un des pays d'Afrique les plus ouverts pour la presse. Avec la crise, tout s'est écroulé, 80% des journalistes indépendants ont fui le pays, l'espace de liberté s'est complètement refermé", a-t-il déploré.
"Nous espérons qu'Esdras pourra revenir au plus tôt au Burundi pour y exercer son métier et rendre compte des évènements dramatiques en cours", a commenté la directrice de l'Information de l'AFP, Michèle Léridon, qui a rendu hommage "à son courage et son professionnalisme".
"Nous attendons toujours des autorités burundaises qu'elles établissent clairement les responsabilités dans son agression", a-t-elle rappelé.
Le prix de la presse diplomatique, décerné chaque année par l'Association de la presse diplomatique française (APDF), est destiné à récompenser un journaliste professionnel pour son travail sur un sujet de l'actualité internationale.
Le prix 2014 avait été décerné au journaliste indépendant Harold Thibault, 30 ans, pour une série d'enquêtes sur la lutte anticorruption menée sous le président Xi Jinping. En 2013, il avait été attribué à la journaliste franco-syrienne indépendante Hala Kodmani pour sa couverture de la situation en Syrie.
Avec AFP