Officiellement, l'opération de ramassage des armes a pris fin depuis le 5 septembre, et selon un premier bilan, plus de 7.000 armes de tout calibre ont pu être collectées, alors que la commission s'attendait à 3.000 armes.
Mais, l'engouement des ex-combattants à déposer les armes continue dans les 15 sites choisis dans le Pool.
Filles et garçons, ainsi que les adultes se précipitent à échanger l'arme contre 150.000 francs CFA.
Dans les rues de Brazzaville, les populations réagissent différemment.
"Le vrai problème c'est Ntumi, il faut qu'il sorte du Pool. Si le gouvernement devait lui construire une maison, ce ne serait pas à Mayama, mais ici à Brazzaville", affirme un ressortissant du Pool.
Une enseignante ajoute : "voyons voir ce que cette opération va donner. Il y a le doute qui existe. Dans trois ans quand il y a aura des élections, c'est toujours le Pool qui sera ciblé ou bien d'autres régions ? Les gens ont raison de douter, ils se réfèrent au passé. Chaque fois qu'il y a guerre, ils partent, ils reviennent et perdent tout".
La société civile reste dubitative. Gaspard Mienantima, dont l'ONG, le CUDHOC, a beaucoup travaillé dans l'assistance des déplacés du Pool à Brazzaville, appelle les autorités à une prise en charge réelle de ces sinistrés qui s'apprêtent à repartir chez eux."
Ces gens-là ont subi les affres de la guerre. Ils sont entrain de repartir chez eux, il faut qu'ils puissent bénéficier de réparation. Les ninjas ont quelque chose, est-ce que c'est suffisant pour qu'ils ne dérangent plus personne ? Il y a discrimination lorsqu'on ne pense qu'aux ninjas, on ne pense pas à la population qui a beaucoup souffert", déplore Gaspard Meinantima.
Les acteurs politiques ont également des opinions diverses sur la question. Joachim Mbandza, candidat aux législatives de 2016 qui n'a pu se faire élire à cause de la guerre, salue le ramassage des armes dans le Pool.
"Ce qu'on a vu, ce n'est encore qu'une partie. Il faut vraiment demander aux jeunes de déposer les armes, elles ne leur servira à rien. On sait qu'il y a encore comme de la méfiance, on se dit si on remet tout, qu'es-ce qui va se passer, on peut nous prendre par le derrière. Nous avons tous honte d'avoir fait cela à la jeunesse. Nous avons connu une jeunesse paisible, pourquoi nous voulons entraîner dans la violence", s'interroge Joachim Mbandza, membre du parti Rassemblement citoyen (RC) de Claude Alphonse Silou, un proche de Denis Sassou N'Guesso.
Eric Mampouya pour sa part dit comprendre l'expression des jeunes quand ils prennent les armes dans le Pool. Voici l'explication que donne cet opposant.
"Tant que les germes de conflit ne seront pas réglés, je vous assure qu'en 2021, ça va reprendre. Je ne suis pas assez courageux, sinon je serais dans la forêt. On l'a dit, voler les élections, ce n'est pas bien, les conflits électoraux conduisent à la guerre. Mais on peut comprendre que l'opprimé se sert des moyens de dictateur pour essayer de résister. Ce ne sont pas les résitants qui ont commencé la guerre, faut pas penser que les ninjas et monsieur Ntumi sont des fous", défend-il énergétiquement.
Pour Paul Marie Mpouele qui a tenté en 2016 une médiation entre ninjas et forces armées, il faut attaquer le mal à la racine.
"Nous pensons que le ramassage des armes ne suffit pas, on l'a déjà fait par le passé, il y a eu résurgence. Qu'est-ce qui anime souvent nos frères du Pool à faire des revendications politiques, mais dans la violence. On a déjà identifié le messianisme comme cause, il faut que les sociologues y travaillent », conseille Paul Marie Mpouele qui dénonce le rachat des armes auprès des ex-combattants, « cela pouvant motiver d'autres jeunes à faire autant".
Après le ramassage des armes, les ex-combattants seront réinsérés dans les activités socioprofessionnelles et le PNUD a déjà alloué pour cela plus de 8 milliards de francs CFA.