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Manifs d'octobre: les autorités tchadiennes avouent avoir arrêté plus de 600 personnes


le président de transition, Mahamat Déby, récemment prolongé à ce poste pour deux ans par un forum de réconciliation nationale
le président de transition, Mahamat Déby, récemment prolongé à ce poste pour deux ans par un forum de réconciliation nationale

La justice au Tchad a annoncé vendredi que plus de 600 personnes, dont 83 mineurs, ont été arrêtées lors des manifestations de l'opposition réprimées dans le sang le 20 octobre, N'Djamena les accusant à nouveau d'avoir "attaqué" les institutions pour mener une "insurrection".

Mais l'opposition, des ONG locales et internationales, ainsi qu'une partie de la communauté internationale, avaient déjà fermement condamné un recours excessif à la violence "contre les civils" dans la répression de ce mouvement de protestation contre la prolongation de deux ans du jeune général Mahamat Idriss Déby Itno à la présidence de la République.

C'était la première fois vendredi que les autorités admettaient publiquement ces centaines d'arrestations évoquées depuis trois semaines par l'opposition et les défenseurs des droits humains, lesquels assurent que les "prisonniers politiques" sont bien plus nombreux et que les "rafles" se poursuivent quotidiennement depuis.

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Le nouvel homme fort de N'Djamena avait été proclamé chef de l'Etat par les militaires il y a 18 mois à l'annonce de la mort de son père, le président Idriss Déby Itno, tué au front par des rebelles après avoir dirigé d'une main de fer le Tchad 30 années durant.

Le pouvoir n'a reconnu à ce jour qu'une "cinquantaine" de morts par balles et plus de 300 blessés pour la seule journée du 20 octobre, dont une "dizaine de tués" parmi les forces de l'ordre.

Et le président de transition, Mahamat Déby, récemment prolongé à ce poste pour deux ans par un forum de réconciliation nationale boycotté par une grande partie de l'opposition et d'importants groupes rebelles, a toujours affirmé que les manifestants du 20 octobre planifiaient une "insurrection" pour renverser le pouvoir.

prison en plein désert

Durant la seule journée des manifestations, "621 personnes ont été interpellées par les forces de l'ordre et transférées" à la prison de haute-sécurité de "Koro Toro", en plein désert à plus de 600 km de la capitale, a annoncé vendredi à la presse le ministre de la Justice Mahamat Ahmat Alhabo. En précisant qu'on leur reprochait "des actes graves et des attaques ciblées contre les institutions de la République".

Et 401 seront rapidement jugées en procédure de flagrant délit, selon le ministre, 137 déférés devant des juges d'instruction et 83 mineurs devant des juges pour enfant.

Le soir du 20 octobre, le pouvoir avait "suspendu" les partis et organisations de la société civile de l'opposition et décrété un couvre-feu, maintenu aujourd'hui encore à N'Djamena et quelques grandes villes. Depuis, les leaders et cadres de l'opposition ont soit fui à l'étranger, soit sont entrés en clandestinité dans le pays, accusant les forces de l'ordre de continuer de mener des "chasses à l'homme".

Le 20 avril 2021, à l'annonce de la mort du maréchal Déby, l'armée avait proclamé son fils Mahamat Déby, général alors âgé de 37 ans, président à la tête d'une junte de 15 généraux, pour une période de transition de 18 mois, au terme de laquelle il promettait de rendre le pouvoir aux civils par des "élections libres et démocratiques".

L'Organisation mondiale contre la torture (OMCT) évoquait déjà fin octobre plus de 2.000 arrestations pendant et après les manifestations réprimées. L'opposition et des ONG locales assurent qu'elle se poursuivent aujourd'hui, mais parlent aussi de "disparitions forcées", "exécutions extrajudiciaires" et "tortures".

Vendredi, le ministre Alhabo a simplement confirmé que le Tchad avait accepté le principe d'une enquête internationale annoncée par le Premier ministre le 8 novembre, mais sans préciser sous l'égide de quelle institution ni quand elle serait initiée.

sanctions

Union africaine (UA) et Union européenne (UE) avaient immédiatement "condamné fermement" la répression du 20 octobre et les "graves atteintes aux libertés d'expression et de manifestation".

Vendredi, le président de la Commission de l'UA, le Tchadien Moussa Faki, devait présenter un rapport, dont l'AFP a pu se procurer une copie, pour recommander à l'organisation panafricaine à Addis Abeba de "condamner fermement les meurtres, la torture, l'arrestation et les emprisonnements arbitraires de centaines de civils" et d'exiger "la libération immédiate de tous les détenus politiques".

M. Faki, que N'Djamena soupçonne publiquement de vouloir se présenter à la présidentielle tchadienne dans deux ans, recommande aussi à l'UA de prendre des sanctions contre "les militaires" au Tchad, par "soucis de cohérence" et afin de "sauvegarder un minimum de crédibilité" à l'UA qui en a imposé ces deux dernières années "au Soudan, au Mali, à la Guinée et au Burkina Faso" pour des putschs militaires.

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