Kissima Diagana, directeur de la rédaction de l’hebdomadaire La Tribune, livre sur VOA Afrique une analyse sur le bras de fer entre le chef de l'Etat mauritanien et les poètes.
Le président mauritanien estime qu’il est plus intéressant pour les jeunes des universités de se tourner vers les filières scientifiques afin de contribuer au développement du pays.
"On peut parler des conflits d’humeur entre le président et les poètes. On reprocherait notamment au président de ne pas porter beaucoup d’attention et d’importance à ces gens qui s’occupent de la poésie en Mauritanie, compte tenu du fait que le président donne plus de priorité à la science, aux matières techniques ", soutient M. Diagana.
Pour lui, il n’est pas opportun non plus de parler de grève de poètes.
"Parler de grève de poètes, grève par rapport à quoi ? Grève pour dire que nous n’allons plus produire des poésies ou dire que nous allons exprimer quelque chose à travers cela. En tout cas, je ne vois pas du point de vue de fait, ou du point de vue de conséquences sur le développement immédiat que ça peut représenter", s’interroge-t-il.
La Mauritanie est une société où l’expression, c’est-à-dire, la force de la parole est très marquée.
Les deux communautés arabe et négro-africaine y vivant ont chacune son côté littéraire et donnent plus de valeur à l’oralité.
"La poésie, la parole chantée, elle permet d’exprimer toutes les situations, que ça soit les situations lyriques, que ça soit les situations purement sociologiques ou les situations guerrières, et tout ce que cela peut comporter. Ce n’est pas par hasard qu’on a appelé la Mauritanie le pays au million de poètes", explique le directeur de la rédaction de La Tribune.
Soulignant l’importance de la poésie pour les populations de toutes générations en Mauritanie, l’analyste révèle cependant le revers de ce penchant qui accroît le chômage dans le pays.
"La demande aujourd’hui sur le marché du travail, de l’emploi, est telle que certaines autorités considèrent, en tout en cas, qu’il faut donner dans l’éducation plus de priorité aux matières scientifiques et faire comprendre aux populations qu’on ne peut pas développer le pays par la poésie", affirme-t-il.
Mais cette question reste sensible parce qu’elle touche la culture qui est sacrée.
"C’est une question culturelle, vous savez les questions culturelles sont très sensibles, et y toucher risque de porter atteinte à tout ce que les gens ont comme valeurs, ce qu’ils ont comme patrimoine à conserver", conclu-t-il.