Dans la chaleur écrasante du camp de Luwani (sud), des agents du Haut-commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) recensent les volontaires prêts à rejoindre leurs villages dans la province de Tete, de l'autre côté de la frontière.
Autour d'eux, les bennes des premiers camions s'alourdissent de montagnes de sacs de nourriture et de baluchons de vêtements.
Luis Pasengese est un des premiers candidats au départ. Si rien ne vient contrarier ses plans, il prendra la route cette semaine. Sa vie est un long récit d'exode, concentré de l'histoire de son pays.
Ce père de trois jeunes enfants est né il y 26 ans dans ce même camp de Luwani. Sa famille s'y était installée pour fuir la guerre civile qui faisait rage dans son pays entre l'armée du régime du Front de libération du Mozambique (Frelimo) et les rebelles de la Résistance nationale du Mozambique (Renamo).
Quelques années après la fin de ce conflit meurtrier en 1992, ses parents sont rentrés au pays. Mais en 2013, les hostilités ont repris entre l'armée et la rébellion.
Et quand sa maison a été incendiée il y a trois ans, Luis Pasengese n'a eu d'autre choix que de repartir à Luwani.
"La guerre est finie"
Aujourd'hui, l'heure est à nouveau à la détente. Malgré le décès en juin de son chef historique Afonso Dhlakama, l'opposition et le président Filipe Nyusi sont parvenus à s'accorder sur une réforme de décentralisation des pouvoirs et la réintégration des combattants rebelles dans l'armée et la police.
Et des élections locales sont prévues début octobre.
"La guerre est finie et les gens (chez nous) vivent en paix donc nous n'avons plus aucune excuse pour continuer à vivre ici comme des réfugiés", résume M. Pasengese.
"Nous allons donc rentrer, recoller les morceaux et voir où tout ça nous mène", ajoute-t-il, fataliste. "Nos maisons ont été incendiées, je sais que je n'aurai pas d'abri en rentrant (...) mais j'espère que ma famille pourra m'héberger le temps que je reconstruise un logement".
Fermé après la guerre civile, le camp de Luwani a été rouvert par le gouvernement du Malawi en 2016 après la reprise des affrontements entre Frelimo et Renamo.
Entre 2015 et 2016, plus de 12.000 Mozambicains se sont installés au Malawi, selon l'ONU. En mars dernier, ils y étaient encore plus de 3.000.
Les négociations tripartites engagées entre Lilongwe, Maputo et le HCR autour de leur rapatriement sont toujours en cours. Mais pour beaucoup de réfugiés, le temps presse.
Droit inaliénable
"Ils veulent rentrer maintenant pour s'occuper de leurs fermes et de leurs champs avant le début de la saison des pluies, sinon ils vont devoir rester un an de plus dans le camp", explique la représentante de l'agence onusienne au Malawi, Monique Ekoko.
"Le HCR ne peut pas ne pas en tenir compte puisque le retour volontaire est un de leurs droits inaliénables", plaide-t-elle, "nous leur offrons une enveloppe financière de retour (...) et ils organisent eux-mêmes leur voyage".
A la fin de la semaine derrière, l'agence de l'ONU avait recensé quelque 500 candidats au retour.
Agée de 32 ans, Patricia Ekeson espère rejoindre leur cohorte au plus vite. Elle a débarqué en urgence en 2014 au Malawi avec son mari et leurs enfants après l'attaque de leur village, qui a coûté la vie à son beau-père et à plusieurs de leurs proches.
Après avoir vécu dans la précarité le long de la frontière, elle a fini par échouer au camp de Luwani, où la dernière de ses filles est née il y a huit mois.
"Nous avons vécu en paix ici avec ma famille", explique Patricia Ekeson, "mais il nous faut maintenant rentrer pour vivre à nouveau notre vie de façon indépendante". Elle et son mari ont hâte de retrouver leur lopin de terre et leur vie d'avant la guerre.
Avec AFP