Quatre jours après la catastrophe aérienne, la pire qu'ait jamais connue la Russie, les causes du crash de l'Airbus A321 de la compagnie charter russe Metrojet, qui a fait 224 morts après son décollage de la station balnéaire égyptienne de Charm el-Cheikh (est), n'ont pas encore été officiellement élucidées.
Au Caire, les enquêteurs ont extrait les données de l'une des deux boîtes noires, espérant que l'examen des enregistreurs de vols permettrait de trancher entre les deux hypothèses envisagées: défaillance technique ou attentat.
A Washington comme à Londres, on privilégie ouvertement la deuxième thèse.
Un haut responsable américain, s'exprimant sous couvert d'anonymat auprès de l'AFP, a jugé "hautement probable" l'hypothèse d'une bombe à bord. Les chaînes américaines CNN et NBC ont cité des responsables du renseignement s'inscrivant dans la même ligne.
"Il y a une forte probabilité que le crash ait été causé par un engin explosif se trouvant dans l'avion", a de son côté affirmé le ministre britannique des Affaires étrangères Philip Hammond après une réunion d'urgence du gouvernement mercredi soir.
"A la lumière de nouvelles informations, nous avons des craintes que la chute de l'avion ait été provoquée par un engin explosif", avait également déclaré plus tôt dans la soirée un porte-parole du Premier ministre britannique David Cameron, précisant néanmoins ne pouvoir "toujours pas dire catégoriquement pourquoi l'avion russe s'est écrasé".
En conséquence, "nous avons décidé, par précaution, de suspendre les vols entre Charm el-Cheikh et le Royaume-Uni", a ajouté le porte-parole, alors que le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi arrivait à Londres pour une rencontre jeudi avec David Cameron.
"Cela donnera le temps aux experts britanniques de l'aviation, en route pour Charm el-Cheikh, d'analyser le dispositif de sécurité à l'aéroport et de vérifier si des mesures supplémentaires sont nécessaires", a-t-il poursuivi.
Après l'annonce de Londres, l'Irlande a demandé à ses compagnies "de suspendre leurs vols vers et en provenance de l'aéroport de Charm el-Cheikh et de ne plus survoler le Sinaï jusqu'à nouvel ordre".
Une boîte noire endommagée
L'aéroport de Charm el-Cheikh accueille chaque jour des milliers de touristes venus passer des vacances sur la mer Rouge. Il se trouve dans le Sinaï, mais loin du secteur où sévit la branche égyptienne de l'EI.
Cette branche, qui se fait appeler "Province du Sinaï", a réaffirmé mercredi sur Twitter être à l'origine de la catastrophe, quatre jours après avoir annoncé qu'elle avait "fait tomber" l'avion. Le groupe a indiqué que "l'attaque" avait été menée en représailles à "l'arrestation de femmes bédouines par les forces apostates" dans la région.
Le président égyptien a prévenu qu'il faudrait "du temps" pour déterminer la cause du crash et qualifié de "spéculations sans fondement" l'idée d'un attentat de l'EI.
L'Airbus A321 s'est écrasé samedi dans le Sinaï 23 minutes après avoir décollé, tuant ses 217 passagers, la plupart originaires de Saint-Pétersbourg (nord-ouest de la Russie), et ses sept membres d'équipage. Les recherches se poursuivent pour retrouver les derniers corps et d'éventuels indices dans une vaste zone désertique.
Au Caire, les enquêteurs ont extrait les données contenues dans l'enregistreur des données de vol, qui "doivent être analysées", a dit le ministre de l'Aviation civile Mohamed Hossam Kamal. L'autre boîte noire, qui enregistre les conversations dans le cockpit, "a été partiellement endommagée et il faudra beaucoup de travail pour en extraire les données", selon lui.
Pour la compagnie Metrojet, seul un facteur "extérieur" peut expliquer le crash. Elle a rejeté la possibilité d'"une défaillance technique" ou d'"une erreur de pilotage" et a déclaré que l'avion était en "excellent état".
Selon la chaîne CNN, citant un responsable américain anonyme, un satellite militaire américain avait détecté un "flash de chaleur" provenant de l'Airbus au moment du drame, ce qui "suggère qu'un événement catastrophique - y compris peut-être une bombe - s'est produit en vol".
Il est exclu que l'avion ait pu être atteint à près de 10.000 mètres d'altitude par un missile du type de ceux dont dispose l'EI dans le Sinaï. Restent deux hypothèses: un problème technique qui provoque une explosion et une dislocation immédiate de l'appareil ne laissant pas le temps au pilote de communiquer -cas rarissime selon les experts-, ou une bombe, apportée dans l'appareil.
Pour les experts, même un engin explosif de petite taille est suffisant pour ouvrir une brèche dans la carlingue et disloquer l'appareil, en raison de la pressurisation à haute altitude.
Avec AFP