La Minusma, qui prévoyait de quitter ses camps à partir de la mi-octobre, a engagé ce désengagement sans attendre alors que la région est le théâtre d'une escalade militaire pour le contrôle du territoire. "Dans un climat de haute tension, la Minusma a entamé le processus de retrait de ses camps dans la région de Kidal, en commençant par Tessalit et Aguelhok", a dit la force dans un communiqué publié lundi après-midi.
Dans la matinée, l'armée malienne, anticipant le décrochage de la Minusma, avait fait atterrir à Tessalit deux avions, qui ont essuyé à l'atterrissage des tirs attribués aux rebelles séparatistes, ont indiqué deux responsables aéroportuaires. Les appareils transportaient des soldats maliens et des membres de la société paramilitaire russe Wagner, ont-ils dit.
Le camp de la Minusma, occupé surtout par des Tchadiens, est situé à proximité de l'aéroport. L'armée malienne a dit sur les réseaux sociaux qu'un seul avion avait été visé mais qu'il avait pu se poser et repartir sans difficulté après que l'aviation eut "neutralisé" les positions ennemies.
La Minusma a cité les accrochages de la matinée comme illustrant "la détérioration rapide des conditions de sécurité pour la vie de centaines de soldats de la paix". Elle a dit tout faire pour achever son retrait, "dès que possible, y compris, si nécessaire, en accélérant son retrait du camp de Kidal, prévu à l'origine pour la mi-novembre".
Critiquée de toutes parts
Les colonels arrivés au pouvoir au Mali par la force en 2020 ont réclamé en juin, après des mois de dégradation des relations, le départ de la Minusma déployée depuis 2013 dans ce pays en proie au jihadisme et à une profonde crise multidimensionnelle. La Minusma doit quitter le pays d'ici au 31 décembre, et le départ de ses camps a exacerbé les rivalités pour le contrôle du nord du pays.
Les groupes séparatistes à dominante touareg ont repris les hostilités contre l'Etat central, et le Groupe de soutien à l'islam et aux musulmans (GSIM) affilié à Al-Qaïda a multiplié les attaques contre les positions militaires.
La Minusma a transféré depuis août quatre camps aux autorités maliennes. Elle avait avancé l'évacuation de l'un d'eux, celui de Ber, en raison de la montée des tensions. Mais l'évacuation des camps onusiens de la région de Kidal et celui de Kidal même, ville bastion des séparatistes, s'annonce comme la plus inflammable.
Les séparatistes s'opposent à ce que la Minusma remette les camps aux autorités maliennes, ce qui va à l'encontre selon eux des accords passés en 2014 et 2015 quand, après s'être soulevés en 2012, ils avaient accepté de cesser le feu et de faire la paix. La junte a fait du rétablissement de la souveraineté nationale sur tout le territoire son mantra. Elle invoque les textes sur les opérations de maintien de la paix pour dire que la Minusma doit transférer ses camps à l'Etat, ce qu'elle a fait jusqu'alors.
Kidal en particulier, contrôlée par la Coodination des mouvements de l'Azawad, alliance de groupes armés à dominante touareg, est un enjeu majeur, et son insoumission un vieux motif d'irritation à Bamako. Un important convoi de l'armée est parti le 2 octobre de Gao en direction de Kidal. Le GSIM, lui, profite des circonstances pour affermir son emprise et poursuivre le combat contre l'Etat et toute présence étrangère.
La Minusma mène ces opérations d'envergure dans un contexte dangereux et compliqué. Elle est critiquée aussi bien par la CMA que par la junte comme faisant le jeu de l'adversaire. L'ONU avait prévenu samedi que la reprise des hostilités mais aussi les difficultés causées par la junte, comme le blocage de convois logistiques devant partir de Gao pour participer au retrait des camps du nord, risquaient de remettre en question le calendrier de départ des Casques bleus. La junte a résolument écarté une telle éventualité.
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