Plusieurs dizaines de scientifiques dont Nancy Roman, responsable des programmes d'astronomie de la Nasa, ainsi que des groupes musicaux, se sont succédé pendant plus de cinq heures sur une tribune dressée sur l'esplanade du National Mall face à la Maison Blanche.
Une marche a ensuite commencé vers le Capitole, siège du Congrès, la plupart des manifestants brandissant des pancartes sur lesquelles on pouvait lire, entre autres: "La Science pas l'idéologie" ou "les faits scientifiques ça compte".
Ce défilé conclura cette manifestation festive qui coïncide avec la Journée mondiale de la Terre.
D'autres rassemblements se déroulaient dans plusieurs autres villes américaines dont New York et Los Angeles, et plus de 500 marches ont eu lieu à travers le monde, à Londres, Paris, au Ghana ou encore en Nouvelle-Zélande et en Australie.
Le président Donald Trump a réagi samedi dans un communiqué publié par la Maison Blanche: "Une science rigoureuse est essentielle aux efforts de mon administration pour accomplir le double objectif de la croissance économique et de la protection environnementale", affirme-t-il.
"Mon administration est attachée à l'avancement de la recherche scientifique qui permet une meilleure compréhension de notre environnement et des risques environnementaux", ajoute le communiqué publié quelques minutes après que la limousine présidentielle eut croisé des manifestants à Washington.
"Je suis inquiète de la rhétorique anti-science de cette administration et de leur manque de connaissances scientifiques", a expliqué à l'AFP Kathy Ellwood, la soixantaine, une biochimiste venu participer à la marche.
"Ils doivent comprendre que les faits scientifiques sont apolitiques et écouter leurs scientifiques", a-t-elle ajouté.
- La science battue en brèche -
Kara Lukin, 45 ans, une professeur d'immunologie à la Western Governors University qui a fait le déplacement de Denver dans le Colorado avec sa fille de six ans, "espère que cette marche va amorcer un changement aux Etats-Unis où la science et l'éducation ont été dévaluées ces dernières années".
Ces scientifiques se font l'écho du constat fait par Rush Holt, président de l'Association américaine pour l'avancement de la science (AAAS), plus grande organisation scientifique généraliste au monde, forte de 120.000 membres.
Il avait expliqué jeudi que "les chercheurs réalisent de plus en plus que les faits scientifiques sont trop souvent ignorés dans les débats publics et sont remplacés par des opinions et des croyances idéologiques".
Ce phénomène ancien s'est aggravé récemment, a estimé ce scientifique nucléaire, ancien élu démocrate.
Il a pointé le fait que le budget de la recherche représentait moins de la moitié de celui des années 1960 en pourcentage du Produit intérieur brut (PIB).
"Nous ne pouvons pas simplement croiser les bras et supposer que tout le monde comprend à quel point la science est cruciale pour l'économie, la sécurité nationale, l'environnement, la santé humaine et bien d'autres choses", avait quant à lui souligné Eric Davidson, président de l'American Geophysical Union.
Peu après son arrivée à la Maison Blanche, M. Trump a signé des décrets pour démanteler les protections environnementales de son prédécesseur démocrate Barack Obama et a nommé à la tête de l'Agence de protection de l'environnement (EPA) le climato-sceptique Scott Pruitt.
- Canular -
Il avait lui-même dit pendant sa campagne que le changement climatique était "un canular" et promis de retirer les Etats-Unis de l'accord de Paris sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre, une décision encore débattue parmi ses conseillers.
Son premier projet de budget propose une baisse de 31% des fonds alloués à l'EPA et des coupes dans l'enveloppe de recherche des Instituts nationaux de la santé.
Les organisateurs de la marche insistent pour dire qu'elle n'est pas motivée politiquement. Mais certains scientifiques craignent qu'elle ne soit contre-productive car perçue chez les conservateurs comme orientée à gauche.
"Une marche ne peut pas communiquer l'importance de la recherche, notamment sur le climat, à nos hommes politiques et aux Américains qui ignorent totalement la science", fait valoir auprès de l'AFP Robert Young, professeur de géologie à la Western Carolina University.
"Les scientifiques doivent changer la manière de communiquer avec ces groupes d'Américains", plaide-t-il, citant les populations rurales sans diplôme ou la classe ouvrière des petites villes économiquement sinistrées, qui ont formé le socle de l'électorat du milliardaire.
Sa crainte? "La droite va accuser les organisateurs d'être manipulés par la gauche et (dire) que la science n'est qu'un prétexte pour cette marche".
L'idée de la Marche pour la science est née au lendemain de l'investiture de Donald Trump, quand des Marches des femmes ont été organisées aux Etats-Unis et au-delà pour la défense des droits civiques, mobilisant plus de deux millions de personnes.
Une autre Marche, pour le climat cette fois, est prévue le 29 avril.
Avec AFP