"Le village a été complètement saccagé et pillé. C'est un vrai massacre", a indiqué un ressortissant de Karma sous couvert d'anonymat. "Ceux qui ont fait ça étaient habillés en treillis de l’armée", a-t-il poursuivi, affirmant que "les gens ont peur d'en parler, car ils accusent l’armée et les VDP", des Volontaires pour la défense de la patrie, des supplétifs de l'armée.
Un autre ressortissant de Karma affirme que "le bilan est plus lourd" que celui d'une "soixantaine" de morts annoncé dimanche de source officielle. "Il y a eu plus de 100 morts", selon lui. "On ne peut pas dire si c’est une bavure de notre armée et des VDP ou encore des terroristes", a-t-il souligné, précisant cependant que les auteurs "ont accusé les habitants du village d'avoir été complices de l'attaque terroriste d'Aorema", où des jihadistes présumés ont tué six soldats et 34 VDP il y a une semaine.
Dimanche soir, le procureur du tribunal de grande instance de Ouahigouya (nord), Lamine Kaboré, avait indiqué "que dans le village de Karma", situé dans la province du Yatenga, "une soixantaine de personnes auraient été tuées par des personnes arborant des tenues de nos forces armées nationales". Il avait ajouté avoir "donné les instructions nécessaires" pour "élucider" les faits et "interpeller toutes les personnes qui y sont impliquées".
Selon d'autres habitants joints dimanche par l'AFP, des rescapés ont affirmé que "plus d'une centaine de personnes à bord de motocyclettes et de pickup ont fait une descente jeudi dernier à Karma" et que "des dizaines d'hommes et de jeunes ont été exécutés par ces hommes vêtus de tenues militaires". Ces rescapés ont évoqué un bilan "avoisinant les 80 morts".
Le Burkina Faso, théâtre de deux coups d'Etat militaires en 2022, est pris depuis 2015 dans une spirale de violences jihadistes apparues au Mali et au Niger quelques années auparavant et qui s'est étendue au-delà de leurs frontières.
Les violences ont fait depuis sept ans plus de 10.000 morts civils et militaires selon des ONG, et quelque deux millions de déplacés. Le président de transition du Burkina Faso, le capitaine Ibrahim Traoré, arrivé au pouvoir par un putsch en septembre 2022, a signé mercredi un décret de "mobilisation générale" d'une durée d'un an.