Dans son bureau du coeur de la capitale Pretoria, le vice-ministre des Sports Gert Oosthuizen s'enflamme volontiers lorsqu'il évoque l'organisation de la première, et pour l'heure unique, Coupe du monde "africaine" de l'histoire.
"On a construit des stades et des infrastructures. On les a livrés en avance, tout s'est bien passé, le monde entier nous a décerné une bonne note", plastronne-t-il.
Mais seize ans après la chute du régime raciste de l'apartheid qui a profondément divisé le pays, l'essentiel n'était pas là. "Le plus important, c'est le sentiment national et la cohésion sociale que nous avons montrés", ajoute le ministre, "nous étions tous très fiers d'être Sud-Africains et simplement Africains".
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Pour accueillir l'événement le plus suivi de la planète, son gouvernement a déboursé à l'époque 30 milliards de rands - soit plus de 3 milliards d'euros d'aujourd'hui - en routes, aéroports, télécommunications ou stades.
Ces investissements massifs ont fait gagner au pays un point de croissance, selon le gouvernement. Et la construction ou rénovation des dix stades a créé 66.000 emplois.
Du 1er juin au 11 juillet 2010, jour de la finale, l'Afrique du Sud a accueilli 1,4 millions de touristes étrangers, contre 1,1 million pendant la même période de 2009.
Voilà pour les recettes immédiates. Mais une fois le bourdonnement des vuvuzelas dissipé, le pays organisateur a-t-il bénéficié d'un effet Coupe du monde ?
'Bon pour l'image'
"Les gains ont largement dépassé les dépenses", tranche sans hésiter Gillian Saunders, du cabinet d'audit Grant Thornton.
"Il y a beaucoup d'infrastructures, les télécommunications ou les routes près des stades, que nous n'aurions pas eues autrement", ajoute-t-elle, "ça a créé un élan tel que les arrivées de touristes ont continué à augmenter l'année suivante".
"C'était un bon exercice de marketing qui nous a mis au centre du monde. C'était bon pour l'image de l'Afrique du Sud et pour le tourisme", confirme Mike Schussler, directeur du centre d'analyses Economists.co.za.
"Mais on n'a jamais récupéré l'argent investi dans les stades", nuance-t-il, "certaines municipalités ont hérité de factures qu'elles devront payer encore longtemps".
Après la Coupe du monde, l'Etat sud-africain a cédé aux villes la propriété de leurs stades, ainsi que leur gestion.
Les plus grandes comme Johannesburg ou Le Cap s'en sont accommodé. Leurs sites accueillent les rencontres des plus grandes équipes de football et de rugby, nationales ou étrangères, ainsi que les concerts d'artistes prestigieux.
Johannesburg a même confié leur gestion au secteur privé.
"A charge pour leurs responsables de commercialiser les sites, d'y attirer des événements, de générer des revenus, de les entretenir et de partager les bénéfices avec la ville", explique le responsable des sports de la ville, Siyanda Mnukwa. "Ils ne pèsent donc que très peu sur nos finances".
La situation est nettement moins réjouissante dans des villes comme Rustenburg, Nelspruit ou Polokwane, qui éprouvent les pires difficultés à remplir leurs gradins.
'Fardeau'
"On nous a dit que les recettes du stade couvriraient son coût. Mais on dépense chaque année 15 à 18 millions de rands pour couvrir ses frais", regrette Frank Haas, le chef de l'opposition à Polokwane. "C'est un fardeau, la question est de savoir si on peut le justifier auprès de la population".
Bien sûr, répond Gert Oosthuizen, qui déplore les comptes d'apothicaires de certains élus.
"On ne parle pas ici de milliards (...) il faut voir (ces stades) comme un bon investissement, comme un héritage qui permet de rassembler les gens et de montrer ce que le continent africain est capable de faire".
Et le ministre d'énumérer la liste des événements sportifs internationaux organisés depuis 2010. Des tournois mineurs toutefois, hormis la Coupe d'Afrique des nations (CAN-2013).
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Il se réjouit aussi des 85.000 personnes qui se sont pressées au FNB Stadium de Johannesburg en mai pour voir un match de gala avec les stars du FC Barcelone.
A cause d'une économie encore fragile, l'Afrique du Sud semble toutefois répugner à postuler à l'organisation des plus grands tournois. Le budget l'a fait renoncer à celle des Jeux du Commonwealth 2022, qu'elle avait pourtant obtenue.
Mais le ministre l'assure, son pays retentera sa chance pour la Coupe du monde de rugby, malgré son échec à l'édition 2023.
Et même, pourquoi pas, les Jeux olympiques. "Nous avons la base pour les organiser", dit-il, "le rêve est vivant mais c'est la conjoncture économique qui dictera notre décision".
Avec AFP