La période de transition qui s'ouvre devrait être dirigée par l'ancien vice-président Emmerson Mnangagwa, 75 ans, bombardé dimanche président du parti au pouvoir et candidat à l'élection présidentielle de 2018.
En exil depuis son éviction le 6 novembre, il devrait "prêter serment en tant que président pour une période de 90 jours", a déclaré le porte-parole de la Zanu-PF, Simon Khaya-Moyo. Sa nomination devrait être officialisée mercredi par le président du Parlement.
Cacique du régime, celui que les Zimbabwéens surnomment "le crocodile" était aux commandes lors des différentes vagues de répression des quatre dernières décennies. Sans attendre sa nomination, l'opposition a demandé des négociations pour démocratiser le pays.
Le chef de la diplomatie américaine Rex Tillerson a salué "une opportunité historique pour les Zimbabwéens" d'en finir avec "l'isolement" de leur pays, souhaitant la mise en place de réformes économiques et politiques.
"La décision prise par le président Mugabe de se retirer montre qu'il a écouté les voix du peuple", a salué la chef de la diplomatie de l'Union européenne Federica Mogherini. Elle a souligné que "l'UE est prête à accompagner" la mise en place d'un "dialogue inclusif qui respecte les aspirations du peuple zimbabwéen à un avenir plus prospère et démocratique et qui encourage l'accélération des réformes essentielles".
En présentant sa démission mardi sous la pression de l'armée, de son propre parti et de la rue qui a aussitôt laissé éclater sa joie, Robert Mugabe a mis un point final à 37 ans de règne sans partage.
Une semaine après un coup de force de l'armée, le plus vieux dirigeant en exercice de la planète, 93 ans, a annoncé sa décision historique dans une lettre au président de l'Assemblée nationale.
- 'Décision volontaire' -
"Moi, Robert Gabriel Mugabe (...) remets formellement ma démission de président de la République du Zimbabwe avec effet immédiat", a lu Jacob Mudenda, provoquant un tonnerre d'applaudissements dans les rangs des élus qui débattaient depuis quelques heures de la destitution.
"Ma décision de démissionner est volontaire. Elle est motivée par ma préoccupation pour le bien-être du peuple du Zimbabwe et mon souhait de permettre une transition en douceur, pacifique et non violente qui assure la sécurité nationale, la paix et la stabilité", a écrit le chef de l'Etat démissionnaire.
Très attendue, l'annonce du départ de l'homme fort du pays a été saluée par des milliers de personnes en liesse, dansant dans les rues de la capitale Harare sous un concert d'avertisseurs.
L'armée, qui contrôle de fait le pays, a appelé au calme pour éviter tout débordement. Son chef d'état-major, le général Constantino Chiwenga, a invité la population "à faire preuve de la plus grande retenue et à pleinement respecter la loi et l'ordre".
- Impopulaire première dame -
Dernier chef d'Etat africain issu des luttes pour l'indépendance encore au pouvoir qui a dirigé son pays d'une main de fer, c'est sa deuxième épouse, Grace, 52 ans, qui a précipité la chute de son régime.
Le 6 novembre, l'impopulaire première dame a obtenu l'éviction du vice-président Emmerson Mnangagwa, qui lui barrait la route dans la course à la succession de son mari, à la santé de plus en plus fragile.
Le limogeage de ce fidèle du régime a provoqué dans la nuit 14 au 15 novembre une intervention de l'armée, qui a pris le contrôle du pays sans officiellement faire de victimes.
A plusieurs reprises, M. Mugabe a catégoriquement rejeté les appels à la démission. La direction de la Zanu-PF, son propre parti, l'avait pourtant spectaculairement démis de ses fonctions de président dimanche, avait exclu de ses rangs son épouse et menacé de le révoquer s'il refusait de se démettre.
Faute de signe de sa part, la Zanu-PF avait lancé mardi au parlement une procédure de destitution, du jamais vu dans l'histoire du pays. Mais dès le début du débat au parlement, le président de l'Assemblée a lu la lettre de démission de M. Mugabe, refermant une page de 37 ans d'histoire du pays.
Et un chantier prioritaire attend le nouveau dirigeant: la reconstruction d'un pays en ruines, où le chômage atteint 90% de la population.
Avec AFP