Quelques jours après une première vague de manifestations d'ampleur dans plusieurs villes du pays, des dizaines de milliers de personnes ont défilé dans les rues de la capitale aux cris de "Zuma doit partir", jusqu'au siège du gouvernement.
Englué depuis des mois dans une litanie d'affaires de corruption, le chef de l'Etat est secoué par une nouvelle tempête politique depuis le remaniement ministériel qu'il a ordonné le 30 mars.
Le limogeage du ministre des Finances Pravin Gordhan, qui s'opposait à lui au nom de la transparence de la gestion des deniers publics, a provoqué la colère de l'opposition et une dégradation de la note financière de l'Afrique du Sud.
Constituée pour l'essentiel de militants de l'Alliance démocratique (DA) et des Combattants économiques de la liberté (EFF), les deux principaux partis hostiles au Congrès national africain (ANC) au pouvoir, la marche de mercredi s'est déroulée sans incident.
"Vous êtes venus en nombre et vous avez envoyé un message fort", s'est réjoui le bouillonnant chef des EFF, Julius Malema, "nous sommes unis pour reprendre le contrôle de notre beau pays".
"Nous, partis politiques, mettons de côté nos différences pour une cause commune, sauver l'Afrique du Sud des mains de Jacob Zuma", a renchéri un responsable local de la DA, John Moodey.
'Zuma doit partir'
Dans la foule, de nombreux manifestants arboraient des pancartes "Hamba Tsotsi" ("Dégage, voleur"), allusion à ses relations avec les Gupta, une sulfureuse famille d'hommes d'affaires.
"Zuma doit partir, il a vendu le pays. Je ne veux plus le voir", a lancé à l'AFP une militante des EFF, Mavis Madisha. "Il y en assez de ce pillage", a ajouté un autre, Mthunzi Nxumalo.
Vendredi, des dizaines de milliers de personnes avaient déjà défilé dans plusieurs villes du pays contre le chef de l'Etat.
La DA et les EFF ont également déposé au Parlement une nouvelle motion de défiance contre le chef de l'Etat.
M. Zuma avait balayé d'un revers de main les protestations, qu'il a qualifiées de "racistes" même si toutes les ethnies, confessions et cultures du pays y étaient représentées.
"Si s'opposer à Zuma c'est être raciste, alors nous sommes racistes", lui a rétorqué mercredi Julius Malema.
Non seulement ce remaniement ordonné par le chef de l'Etat a suscité la colère de l'opposition, mais il a aussi provoqué une crise ouverte au sein de l'ANC.
Plusieurs de ses responsables, le vice-président Cyril Ramaphosa en tête, ont dénoncé la décision du président de démettre Pravin Gordhan, mais sont depuis rentrés dans le rang.
L'ANC divisé
L'ANC, qui dispose d'une confortable majorité de 249 sièges sur 400 au Parlement, a promis de rejeter comme un seul homme la motion de défiance de l'opposition, prévue le 18 avril.
Ce vote pourrait toutefois être retardé en raison d'une querelle juridique autour d'un possible vote à bulletins secrets, dont pourraient profiter les rivaux de Jacob Zuma au sein de l'ANC pour joindre leurs voix à celles de l'opposition.
"S'il y a un vote à bulletins secrets au Parlement, il est probable que ceux qui s'exprimeront contre l'ANC obtiennent la majorité", a pronostiqué mercredi le président du Congrès pour le peuple (Cope, opposition), Mosiuoa Lekota.
A la tête du pays depuis 2009, Jacob Zuma, 75 ans mercredi, doit prendre sa retraite au terme de son second mandat en 2019.
Mais l'ANC désignera dès la fin de cette année celui qui le remplacera à sa tête et deviendrait président du pays en cas de victoire aux élections générales de 2019.
Face au vice-président Ramaphosa, M. Zuma soutient ostensiblement la candidature de son ex-épouse Nkosazana Dlamini-Zuma, qui vient de quitter la présidence de la Commission de l'Union africaine (UA).
Cette guerre de succession nourrit de vives tensions au sein de l'ANC. Au pouvoir depuis la fin officielle de l'apartheid en 1994, le parti de l'icône Nelson Mandela a vu son influence reculer, sur fond de chômage record et de déclin de l'économie.
Aux élections locales d'août dernier, il a obtenu moins de 54% des voix au niveau national, son plus mauvais score depuis 1994.
Avec AFP