Des opposants gabonais ont dénoncé dans une lettre au président français, Emmanuel Macron, sa visite à Libreville le 2 mars à l'occasion d'un sommet international, qui serait perçue comme un "soutien" au chef de l'Etat à six mois de l'élection présidentielle prévue fin août, selon cette lettre consultée vendredi par l'AFP.
"A tort ou à raison, les Gabonais interprèteront votre arrivée dans leur pays comme l'expression du soutien de la France au régime en place, en vue de favoriser son maintien au pouvoir", peut-on lire dans cette lettre datée du 10 janvier et authentifiée par l'AFP. Les douze signataires de cette lettre font partie des principaux leaders de groupes d'opposition et de la société civile parmi les plus virulents contre le régime en place.
"La venue du président Macron au prétexte d'un sommet sur la forêt va être très mal interprétée par l'opinion même si elle n'est pas liée à des questions politiques. Mais la communication du gouvernement va faire en sorte que l'opinion pense que M. Macron est venu adouber Ali Bongo dans sa prochaine candidature", a expliqué à l'AFP Marc Ona Essangui, fondateur du collectif Tournons la Page qui promeut "l'alternance démocratique" et lutte "contre la candidature d'Ali Bongo".
Pour l'heure, M. Bongo n'a toujours pas annoncé officiellement sa candidature même si le chef d'Etat de 63 ans, réélu de justesse en 2016 lors d'élections contestées par l'opposition, est largement pressenti pour être le candidat en 2023 du tout-puissant Parti Démocratique Gabonais (PDG) dont il est le chef et qui l'appelle depuis un an à être son "candidat naturel".
Une source diplomatique à Paris a confirmé à l'AFP la réception du courrier ajoutant que l'ambassade de France à Libreville est "en contact avec les interlocuteurs de la classe politique et de la société civile gabonaises pour exposer et expliquer les objectifs du One Forest Summit auquel participera le Président".
La France a toujours soutenue le système Bongo depuis 50 ans, de père en fils et a maintenu cette famille au pouvoir, ce n'est un secret pour personne, abonde M. Ona. Sollicité, l'Elysée n'a pas souhaité faire de commentaire. Victime en octobre 2018 d'un AVC qui l'avait tenu de longs mois éloigné de la scène politique, Ali Bongo avait été élu président au décès de son père Omar Bongo Ondimba en 2009, après plus de 41 ans au pouvoir.
Ancienne colonie française indépendante depuis 1960, cet Etat d'Afrique centrale de deux millions d'habitants et riche de son pétrole, a longtemps constitué un pays clé pour la France sur le continent.