"Je suis très heureuse. Je n'arrive toujours pas à croire que je suis ici", a-t-elle déclaré, bouleversée, dans un discours prononcé à la résidence du Premier ministre Shahid Khaqan Abbasi à Islamabad, quelques heures après une arrivée qui a pris le pays de court.
"Ces cinq dernières années j'ai toujours rêvé de pouvoir revenir dans mon pays", a-t-elle lancé devant le public.
"Si cela avait été possible, je ne (l)'aurais jamais quitté", a-t-elle ajouté, évoquant avec nostalgie la "beauté" de sa vallée natale de Swat, parfois comparée à la Suisse pour ses paysages verdoyants. Elle en avait été évacuée d'urgence vers la Grande-Bretagne en 2012 après avoir reçu une balle dans la tête lors d'un attentat la ciblant à son retour de l'école.
"Nous sommes vraiment ravis que notre fille, qui a fait beaucoup pour le nom du Pakistan, soit de retour à la maison", a déclaré de son côté le chef du gouvernement. "Vous recevrez un respect total ici".
Visite non annoncée
La jeune femme et ses parents ont atterri au petit matin à l'aéroport d'Islamabad. Leur visite, qui doit durer quatre jours, n'avait pas été annoncée et leur programme n'a pas été rendu public "pour des raisons de sécurité", ont indiqué les autorités. La famille se déplace sous forte escorte policière.
On ignore ainsi si Malala, âgée aujourd'hui de 20 ans, entend se rendre dans son district natal de Shangla, ou dans la ville de Mingora, où s'est produit l'attentat, tous deux situés dans la vallée de Swat (nord-ouest).
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Si elle est célébrée en Occident, son image est plus controversée dans son pays où certains la considèrent comme un "agent de l'étranger" manipulé ou payé pour nuire au Pakistan.
Outre les cercles islamistes radicaux opposés à l'émancipation des femmes, Malala est également critiquée par une partie de la classe moyenne pakistanaise qui lui reproche de ternir l'image du pays.
Nombre de ses compatriotes ont toutefois salué l'annonce de son arrivée, notamment dans sa vallée de Swat et sur les réseaux sociaux.
"Elle est un symbole de courage pour tous les Pakistanais et nous nous réjouissons de sa visite. Elle aurait dû revenir bien plus tôt", a jugé de son côté Ahmad Shah, un ami du père de la jeune femme et habitant de Swat.
"Chers Pakistanais, Malala n'est pas votre ennemie. Vos ennemis sont les monstres qui lui ont tiré dessus à bout portant sur le chemin de l'école", a plaidé une internaute, Shahira Lashari, sur Twitter.
"Certains pensaient que cela n'arriverait jamais. Certains ne voulaient pas que cela arrive", a commenté de son côté l'analyste Michael Kugelman, spécialiste de la région au Wilson Center à Washington, saluant "un grand moment pour le Pakistan".
Six millions pour l'éducation
C'est dans des circonstances dramatiques, entre la vie et la mort, que Malala avait dû quitter son pays en 2012 après sa tentative d'assassinat par des talibans pakistanais.
Elle n'avait plus foulé le sol pakistanais depuis lors. "C'est dur de ne pas voir sa maison, sa famille et ses amis pendant plus de cinq ans", avait-elle déclaré en janvier.
Soignée en Angleterre, où elle vit, elle est devenue une icône du droit des filles à l'éducation. C'est à ce titre qu'elle s'est vue décerner le Prix Nobel de la paix en 2014, conjointement avec l'Indien Kailash Satyarthi.
Après avoir vécu avec sa famille à Birmingham, dans le centre de l'Angleterre, elle poursuit aujourd'hui des études à Oxford.
Malala avait commencé son combat en 2007 lorsque les talibans imposaient leur loi sanglante dans sa vallée de Swat, autrefois paisible région touristique des contreforts de l'Himalaya.
Du haut de ses 11 ans, la fillette alimentait un blog sur le site de la BBC en ourdou, la langue nationale du Pakistan. Sous le pseudonyme de Gul Makai, elle y décrivait le climat de peur régnant dans sa vallée sous la férule des extrémistes.
L'attentat qui a failli lui coûter la vie n'a nullement entamé sa détermination.
"La nouvelle génération du Pakistan est l'avenir du Pakistan. Ce sont les gens. Donc nous devrions investir dans l'éducation de ces enfants", a-t-elle déclaré jeudi matin, soulignant que le Fonds qui porte son nom avait déjà contribué à hauteur de plus de 6 millions de dollars à l'éducation des filles dans le pays.
Avec AFP