CHARLESTON, Caroline du Sud (Reuters) - Le jeune Américain blanc soupçonné d'avoir abattu neuf personnes noires mercredi soir dans une église afro-américaine de Charleston en Caroline du Sud sera une première fois entendu par la justice vendredi.
Au terme d'une chasse à l'homme de 14 heures, le jeune Dylan Roof, 21 ans, a été arrêté jeudi dans une petite ville de Caroline du Nord, à 350 km au nord de Charleston. Barack Obama a souligné que ce genre de violence se produisait trop souvent aux Etats-Unis. Le tireur présumé avait reçu une arme pour ses 21 ans au mois d'avril. Son profil sur les réseaux sociaux suggère une fascination pour la suprématie blanche.
Selon la police, il est resté assis parmi les fidèles pendant près d'une heure avant d'ouvrir le feu, tuant six femmes et trois hommes. Il a rechargé cinq fois son arme, selon un rescapé, malgré les supplications de ses victimes. Il devrait être entendu vendredi au sujet de sa caution. L'audience devrait se faire par liaison vidéo du centre de détention où il est incarcéré dans la région de Charleston, a annoncé le bureau du shérif du comté.
Parmi les neuf personnes de 26 à 87 ans tombées dans l'église Emanuel African Methodist Episcopal Church de Charleston, figurent quatre pasteurs dont l'élue démocrate du Sénat local, Clementa Pinckney, 41 ans. Cet édifice emblématique avait été entièrement brûlé à la fin des années 1820 après une révolte d'esclaves menée par un des ses fondateurs pour être par la suite reconstruit.
Trois autres personnes qui se trouvaient dans l'église au moment du drame s'en sont sorties indemnes, dont un enfant de cinq ans, qui, selon CNN, a fait le mort pour éviter d'être tué. "Le fait que ceci ait eu lieu dans une église noire soulève à l'évidence des questions sur une part sombre de notre histoire", a déclaré Barack Obama. "Une fois encore, des innocents ont été tués, en partie parce que quelqu'un qui voulait faire du mal n'a eu aucun problème à mettre la main sur une arme", a ajouté le président.
"Soyons clairs : à un certain stade, nous allons devoir, en tant que pays, reconnaître le fait que ce genre de violence massive ne se produit pas dans d'autres pays avancés", a déclaré le président à la Maison blanche. "Si vous êtes mécontents que tous les quelques mois, on ait une tuerie de masse dans ce pays tuant des innocents, alors j'ai besoin que vous vous mobilisiez", a-t-il ajouté par la suite.
Aux Etats-Unis, les tueries se sont succédé ces dernières années. Le président avait été particulièrement affecté par celle de l'école Sandy Hook à Newtown dans le Connecticut, où 20 enfants et six adultes avaient été tués en 2012. Il avait dans la foulée essayé de faire voter un contrôle des armes mais s'était heurté à la résistance au Congrès.
Peu de précisions ont été données sur la personnalité de Dylann Roof après son arrestation. Son père lui avait donné récemment une arme de calibre 45 comme cadeau d'anniversaire, selon un homme se présentant comme Carson Cowles et se disant son oncle. Il dit aussi s'être rappelé avoir dit il y a plusieurs années à sa soeur, la mère du suspect, qu'il estimait ce garçon calme un peu trop introverti.
Sur la page Facebook de Dylan Roof, on voit une photo où il porte une veste avec les drapeaux de l'Afrique du Sud du temps de l'apartheid et de la Rhodésie avant que celle-ci ne devienne le Zimbabwe, quand ces deux pays étaient dirigés par la minorité blanche. Beaucoup de ses amis sur Facebook étaient noirs. Le dossier judiciaire du suspect montre qu'il avait eu affaire à la justice deux fois depuis le début de l'année, en mars pour infraction à la législation sur les stupéfiants et en avril pour violation de propriété privée.
Les autorités fédérales étudient la possibilité d'inculper Dylann Roof pour crime motivé par la haine raciale, a indiqué la ministre de la Justice, Loretta Lynch.
Cette tragédie rappelle l'attentat à la bombe commis contre une église afro-américaine de Birmingham en Alabama qui avait provoqué la mort de quatre jeunes filles en septembre 1963 et avait galvanisé le mouvement en faveur des droits civiques. Selon le Southern Poverty Law Center, 4.120 crimes liés à la haine raciale aux Etats-Unis, dont 56 assassinats, depuis 2003.