La fermeture des premiers bureaux de vote a sonné l'heure de tous les dangers: le dépouillement et la centralisation des résultats, avant la proclamation du vainqueur du vote à un tour, attendue à partir de lundi.
Les accusations réciproques ont commencé à fuser. "Jean Ping fait le pitre et ne respecte pas les institutions du Gabon en s'apprêtant à annoncer de faux résultats", a lancé sur Twitter le porte-parole du président-candidat Alain-Claude Bilie-By-Nze.
Sur les réseaux sociaux, des tendances très partielles et invérifiables donnent une très large avance à M. Ping sur M. Bongo, sans parler des huit autres candidats.
Le QG de M. Ping accuse les forces de sécurité d'interdire en certains endroits l'accès du public au centre de vote pour le dépouillement.
Devant l'ambassade du Gabon à Paris, les forces de l'ordre ont dispersé une cinquantaine de personnes "mécontentes car elles n'avaient pas eu le temps de voter avant la fermeture du bureau de vote", selon la police.
Veste bleu marine et chemise bleu ciel, Ali Bongo, 57 ans, a voté près du palais du bord de mer, siège de la présidence qu'il occupe depuis sa première élection en 2009 après la mort de son père Omar, au pouvoir pendant 41 ans.
"Je suis serein", a assuré le chef de l'Etat au terme d'une campagne à l'américaine avec pour slogan "Changeons ensemble".
Sanctionner le PDG
Son équipe a déclaré qu'elle accepterait "le résultat de cette élection, quel qu'il soit", demandant à "l'opposition d'éviter les provocations politiques".
"Le jour de gloire est arrivé!", a proclamé quant à lui M. Ping, 73 ans, ex-patron de l'Union africaine (UA) et surtout ex-ministre de Bongo père dès les années 1980.
Compagnon dans le passé d'une fille d'Omar Bongo, M. Ping ne promet pas moins que "la première alternance et la deuxième indépendance du Gabon".
"On veut sanctionner le PDG", le parti au pouvoir, lance l'une de ses électrices, Dolorès, dans un bureau mêlant classes moyenne et populaire à la sortie de la ville. Et la jeune femme d'énumérer une litanie de problèmes sociaux: "pauvreté", "pas de travail", "pas de médicaments", "routes à moitié construites"...
Les observateurs de l'Union européenne (UE) et de l'Union africaine (UA) n'ont fait état d'aucun incident, à part des retards à l'ouverture dans plus de la moitié des bureaux.
Le vote s'est également déroulé dans le calme à Port-Gentil, la capitale économique, où des violences avaient éclaté en 2009 après l'élection d'Ali Bongo. "La meilleure façon de chasser Ali et toute sa bande de danseurs, c'est dans les urnes", a déclaré à l'AFP une électrice, Françoise Mba.
"J'ai voté pour donner un coup de pied à cette bande de fausse opposition qui n'a pas de projet pour le pays", assurait au contraire Steve, 32 ans.
Frappée par la crise du pétrole, Port-Gentil est une ville symbole des tension sociales au Gabon. Un tiers des quelque deux millions d'habitants vit dans la pauvreté malgré de grandes richesses forestières et minières.
Accusation de fraude
Des dizaines d'observateurs européens et africains doivent garantir un processus électoral "clair et transparent", comme l'a répété M. Bongo en votant.
"En face nous savons qu'ils préparent la triche, c'est à vous d'être vigilants", a lancé M. Ping à la presse. "Le dépouillement est public, ça doit se passer devant nous", insistait l'un de ses partisans, Amaury Pascal, dans un bureau de vote.
Vendredi, le secrétaire général des Nations unies Ban Ki-moon avait exhorté les candidats "à s'abstenir de toute incitation à la violence".
"Des violences se préparent dans certains quartiers de Libreville et à Port-Gentil. Nous avons déjà identifié les leaders", avait confié mercredi à l'AFP une source gouvernementale.
Les forces de sécurité étaient présentes dans les bureaux, et de manière normale dans la capitale. Par sécurité, les autorités avaient fermé les frontières terrestres, maritimes et aériennes samedi de 0H00 à 20H00.
En l'absence de sondages, Ali Bongo a longtemps fait figure de favori face à Jean Ping. Le rapport de force s'est rééquilibré avec l'alliance mi-août des principaux candidats du second.
Avec AFP