Le compagnon du policier tué, Etienne Cardiles, a commencé par saluer la mémoire de l'homme qu'il aimait dans un discoursému: "Je souffre sans haine (...) Cette haine Xavier, je ne l'ai pas parce qu'elle ne te ressemble pas (...) Le dialogue, la tempérance et la tolérance étaient tes meilleures armes".
L'attaque était survenue le 20 avril sur la célèbre avenue parisienne, trois jours avant le premier tour de la présidentielle. Elle a été revendiquée par le groupe Etat islamique.
Emmanuel Macron et Marine Le Pen avaient réagi à l'événement de facon diamétralement opposée, le centriste, libéral et pro-européen, appelant les Français à ne pas "céder à la peur" alors que la cheffe de l'extrême droite avait déclaré redouter de nouveaux attentats et avait martelé son programme ultra-sécuritaire.
Le président socialiste François Hollande les a tous deux conviés mardi à la préfecture de police de Paris pour la cérémonie d'hommage à Xavier Jugelé, qui est devenu à 37 ans le 239-ème mort de la vague d'attentats jihadistes commis en France depuis début 2015.
"De nouveau, la France a perdu l'un de ses fils parmi les plus braves, la République a perdu l'un de ses gardiens les plus valeureux", a déclaré M. Hollande lors de cet hommage national, au cours duquel il a égrené les noms des 4 autres policiers tués par des jihadistes depuis 2015.
Le chef de l'Etat a appelé dans la foulée les deux candidats qualifiés pour le second tour de l'élection présidentielle, le 7 mai, à "accorder les ressources budgétaires nécessaires" aux forces de l'ordre.
A l'inverse de son rival centriste, assez discret depuis lundi, la candidate de l'extrême droite s'est très vite replongée dans la campagne en multipliant les déplacements: mardi matin, elle a visité l'immense marché de Rungis, en banlieue parisienne, qui approvisionne la capitale française, après un déplacement la veille dans une petite ville du nord du pays. La sécurité est l'un de ses thèmes de prédilection.
Le meurtrier, Karim Cheurfi, déjà condamné pour des violences, a tué le policier de deux balles dans la tête sur les Champs-Élysées, blessant aussi deux autres fonctionnaires et une touriste avant d'être abattu.
Plusieurs candidats, dont Mme Le Pen et M. Macron, avaient alors annulé leurs derniers déplacements électoraux et le thème de la lutte antiterroriste avait ressurgi dans la campagne avant un scrutin organisé sous haute sécurité.
- 'Sursaut démocratique' -
"Ne cédez rien à la peur, ne cédez rien à la division, ne cédez rien à l'intimidation", avait exhorté M. Macron. Il avait assuré qu'il serait "implacable" pour "protéger" les Français.
S'il est élu, il veut doper le renseignement pour lutter contre la radicalisation islamiste et embaucher "10.000 policiers et gendarmes".
Marine Le Pen a fait de la fermeture des frontières son mot d'ordre. Elle prône aussi l'expulsion des étrangers considérés comme une menace potentielle, la déchéance de nationalité des binationaux dangereux, le renforcement des moyens policiers... "Depuis dix ans, tout a été fait pour que nous perdions" la "guerre qui nous est menée", a-t-elle dénoncé.
Ses déclarations lui ont valu les foudres de l'exécutif socialiste français: "Marine Le Pen cherche comme après chaque drame à en profiter pour instrumentaliser et diviser", a déclaré le Premier ministre Bernard Cazeneuve. Il avait aussi, comme d'autres, estimé que la fusillade pourrait peser dans les urnes en faveur de la dirigeante du parti Front National.
Pourtant, selon les analystes, l'attentat n'a pas fondamentalement influencé le vote. Son effet est resté "extrêmement marginal", "seuls 4% des Français disent qu'il a joué un rôle dans leur vote", a relevé lundi Frédéric Dabi de l'institut IFOP, qui a réalisé une enquête dimanche sur ce thème. Peut-être parce que depuis 2015, les Français ont "intériorisé le contexte de la menace terroriste".
Lors du premier tour de la présidentielle française, Emmanuel Macron est arrivé en tête dimanche avec 24,01% des suffrages, Marine Le Pen recueillant elle 21,30%.
Avec AFP