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Qui est le colonel Bah N'Daw?


 L'ex ministre malien de la Défense Bah N'Daw, à droite, et son homologue français Jean-Yves Le Drian se rencontrent à Bamako, le 16 juillet 2014. Bah N'Daw a été nommé président du Mali pour la période de transition.
L'ex ministre malien de la Défense Bah N'Daw, à droite, et son homologue français Jean-Yves Le Drian se rencontrent à Bamako, le 16 juillet 2014. Bah N'Daw a été nommé président du Mali pour la période de transition.

D'abord l'humiliation militaire, puis le putsch: pour la deuxième fois en six ans, le colonel Bah Ndaw, futur président de la transition malienne, doit sa promotion à l'échec du chef de l'Etat déchu Ibrahim Boubacar Keïta.

Agé de 70 ans, natif de San, dans le centre du pays, "le grand" comme l'appellent ses intimes eu égard à son mètre 95, est un personnage relativement peu connu du grand public qui a fait toute sa carrière dans l'Armée de l'air malienne, depuis sa création en 1976.

Incorporé comme engagé volontaire dans l'armée le 1er juin 1973, il est sélectionné l'année suivante pour un stage de pilote d'hélicoptère dans ce qui est alors l'Union soviétique, où se sont formés bien d'autres cadres militaires maliens.

Le colonel Bah Ndaw a été aide de camp du dictateur Moussa Traoré, décédé la semaine dernière, arrivé au pouvoir par un putsch en 1968 et renversé par un autre en 1991, qui devait aboutir à la restauration d'un pouvoir civil.

Tour à tour chef d'état-major de l'aviation, directeur du Génie militaire, et chef d'état-major adjoint de la Garde nationale, entre autres fonctions, il est aussi diplômé de la prestigieuse Ecole de guerre de Paris.

En 2008, le colonel-major Bah Ndaw devient directeur de l'Office national des anciens combattants militaires retraités et victimes de guerre (ONAC), puis fait valoir ses droits à la retraite en 2012.

Mais deux ans plus tard, c'est ce colonel à la retraite qui se retrouve à la tête des forces armées, en tant que ministre de la Défense du président Keïta, à la suite de la défaite cinglante de l'armée malienne à Kidal (nord-est), bastion de l'ex-rébellion à dominante touareg.

Son prédécesseur, Soumeylou Boubèye Maïga, un poids lourd de la politique malienne, démissionne au lendemain de cette humiliation, refusant qu'on fasse "porter le chapeau à la hiérarchie militaire", selon son entourage.

Mais le nouveau ministre de la Défense n'occupera ce poste que quelques mois.

C'est un nouvel échec du président Keïta, définitif celui-là, qui fait cette fois ressortir le colonel Bah Ndaw de sa retraite.

Le 18 août 2020, un putsch officiellement réalisé sans effusion de sang a raison du pouvoir de M. Keïta, affaibli par des mois de contestation face à la grave crise sécuritaire, économique et institutionnelle dans laquelle s'enfonce inexorablement le pays.

Après des semaines de tractations et de concertations sur la durée de la transition vers une restauration du pouvoir civil et sur les personnalités chargées de la conduire, la junte a annoncé lundi le nom de Bah Ndaw.

Le colonel prêtera serment vendredi, a précisé le chef de la junte, le colonel Assimi Goïta, lui-même vice-président de cette transition, qui doit durer au maximum 18 mois.

La Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (Cédéao) a suspendu dès le 20 août le Mali de ses organes de décision et infligé un embargo financier et commercial à ce vaste pays pauvre et enclavé. Elle a indiqué la semaine passée qu'elle lèverait ces sanctions aussitôt que la junte aurait accédé à ses exigences.

La Cédéao et des partenaires du Mali comme la France s'inquiètent d'un surcroît d'instabilité propageant encore davantage à travers le Sahel le jihadisme et les violences intercommunautaires auxquelles le pays est en proie.

Le colonel Goïta a promis lundi soir de gagner "la guerre" contre les jihadistes, dans un discours télévisé à la veille de la fête nationale.

Mais la Cédéao se veut aussi préoccupée par le mauvais exemple que donnerait une junte maintenue durablement au pouvoir.

Les nouveaux maîtres de Bamako, qui ont promis dès leur arrivée de rendre à terme les commandes aux civils, voulaient conserver la mainmise sur la transition. La nomination d'un ancien militaire semble une manière de compromis.

Dans un flash interrompant les programmes de la télévision nationale, le colonel Goïta, portant toujours sa tenue de camouflage et son béret vert, a fait référence aux positions internationales en évoquant le "contexte global" et les engagements internationaux du Mali pour justifier les choix du jour.

La piste d'un militaire à la retraite se dessinait depuis plusieurs jours.

- A priori 18 mois -

"Il n'y a pas fondamentalement d'homme de la situation dans le pays", a commenté le chercheur Baba Dakono, "il y a des personnalités qui sont moins clivantes et je pense qu'il fait partie des personnalités qui sont les moins clivantes".

Il prêtera serment vendredi, a indiqué le colonel Goïta. C'est au président qu'il appartiendra de nommer un Premier ministre, en vertu d'une charte retenue par la junte pour organiser la transition. La Cédéao réclame là aussi qu'il s'agisse d'un civil.

Les Maliens se sont profondément divisés entre les partisans d'une transition longue confiée aux militaires et leurs contradicteurs.

Les premiers arguent du temps et de l'autorité nécessaires pour créer les conditions d'un redressement dans un pays au bord du gouffre.

Les seconds redoutent une réédition des erreurs du passé dans un pays qui en est à son quatrième putsch en soixante années d'indépendance, célébrée mardi.

Le rôle imparti au vice-président était un motif d'alarme supplémentaire pour eux.

La "charte de transition" prévoit une transition de 18 mois, à laquelle la Cédéao s'est montrée prête à consentir après avoir insisté initialement sur un maximum de 12 mois.

Le médiateur de la Cédéao dans cette crise, l'ancien président nigérian Goodluck Jonathan, est attendu mercredi au Mali.

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