"Ma maison a été consumée par la lave. J'ai sept enfants. Ici on n'a pas de nourriture. On souffre énormément", se lamente Furaha Mawazo, parmi les quelque 4.000 familles déplacées installées dans une cour d'école à Kayembe, à 4 km au nord du chef-lieu du Nord-Kivu.
Ici les tentes sont faites de vieilles bâches et toiles délavées par la pluie, récupérées ici et là par des habitants qui, après avoir fui l'éruption du 22 mai, n'ont rien retrouvé de leurs habitations à leur retour.
Les abris sont minuscules, comme celui de Joséphine Kakuru Mayani, la cinquantaine, veuve et elle aussi mère de famille nombreuse. Deux mètres carrés, montre-t-elle, dans lesquels tout le monde s'entasse la nuit.
Lors de l'éruption, qui a semé la panique dans la ville de 2 millions d'habitants, elle s'était enfuie avec ses proches vers Saké, à 27 km de Goma, où elle avait été hébergée dans "une famille hôte".
L'éruption a fait 32 morts, détruit plusieurs centaines de maisons et entraîné le déplacement de dizaines de milliers de personnes, surtout à partir du 27 mai, lorsqu'on craignait une éruption limnique du lac Kivu, susceptible de libérer d'énormes quantités de gaz mortels.
Une dizaine de jours plus tard, quand le volcan ne semblait plus menacer, les déplacés sont revenus. La coulée de lave s'étant miraculeusement arrêtée aux faubourgs de Goma, où les activités ont aujourd'hui repris normalement, certains ont pu se réinstaller chez eux. Mais d'autres ont retrouvé leur parcelle submergée par la lave durcie, toutes leurs affaires disparues.
Abris détruits par la tempête
Des abris provisoires ont été construits dans un rayon de moins de 10 km autour de Goma, à Kayembe, Bujovu, Bujara, Kanyaruchinya.
"En quittant Saké, j’étais heureuse, je me disais que j'allais bien vivre dans ma ville, malgré les poussières que le Nyiragongo nous a laissées en souvenir", se rappelle Joséphine. Mais maintenant, elle regrette d'être revenue, de devoir vivre dans ce campement insalubre et "dans une maison dans laquelle elle ne peut même pas se mettre debout".
"Nous dormons par terre et mangeons une fois tous les deux jours", décrit, épuisé, Gakuru Shabani, responsable du "bloc 4" du campement de Kayembe. "Nous alertons le gouvernement et les organisations humanitaires: venez-nous en aide!", lance-t-il.
Au retour des sinistrés à Goma, Médecins sans frontières (MSF) a aidé les autorités à faire face, prodiguant des soins médicaux gratuits aux sinistrés, distribuant de l'eau. Mais, souligne Homam Shahhoud, chef de mission adjoint de MSF en RDC, "les besoins sont immenses, à commencer par l’accès à l’eau potable, à des conditions hygiéniques décentes, essentielles pour prévenir les maladies hydriques".
Certains sinistrés sont par ailleurs scandalisés que des personnes n'ayant souffert en rien de l'éruption bénéficient d'aide humanitaire. "Les bons permettant d’avoir les vivres sont parfois donnés aux personnes inappropriées et les concernées, elles, en manquent". "Des policiers et soldats s’accaparent les dons de sinistrés", accuse Joséphine.
Le président Félix Tshisekedi était à Goma mi-juin. "Je suis venu vous consoler et me rendre compte de votre vécu", déclarait-il devant les déplacés, ajoutant avoir demandé au génie militaire de bâtir des maisons et des écoles.
"Nous travaillons dur pour que la condition des sinistrés soit améliorée et qu’ils retrouvent des abris viables", assure le général Jules Kuzangana, responsable de la construction des hébergements des sinistrés, interrogé par l'AFP à Kanyaruchinya. Ici, à 3 km de Kayembe, des abris mieux aménagés, en tôle et bâches, ont effectivement été construits.
La semaine dernière, certains d'entre eux ont été détruits par des vents forts chargés de pluie. Sur un millier d'abris, 67 sont hors d'usage, détaille le général, qui se veut optimiste malgré tout. "Nos supérieurs nous ont promis des moyens pour reconstruire. D’ici les jours prochains, les sinistrés vont y habiter", promet-il.