"Ils ont volé des biens de valeur, ils ont violé les femmes".
Abdoul Kenzire vit actuellement à Goma dans une famille d'accueil. Il a fui le territoire de Masisi, avec la recrudescence de l'insécurité causée par les groupes armés et les conflits inter-ethniques.
A Goma, où il vit désormais, il n'a aucune activité, la vie est difficile. Il ne peut plus subvenir aux besoins de sa famille ni payer les frais de scolarité de ses enfants, qui cette année n'iront pas à l’école, faute de moyens.
"Quand nous sommes en déplacement, quand nous ne travaillons plus nos champs, n'ayant aucune autre source de revenus, la vie nous paraît difficile. Je ne crois plus que mes enfants vont étudier, je ne peux même plus retourner au village à cause de l'insécurité, maintenant nous vivons dans le désespoir ", regrette M. Kenzire.
Jean-Paul Havugimana, ancien éleveur qui s'est reconverti dans l'agriculture, se souvient avec amertume du jour où des hommes armés ont pris d'assaut sa concession.
"Avant, j'élevais des vaches, j'en avais une cinquantaine. Mais par malchance, un groupe d'hommes armés est venu et a tué toutes les vaches, ils n'avaient rien pris avec eux. Ils sont donc venus juste pour tuer et partir. Aujourd'hui, je pratique l'agriculture, mais c'est difficile de m'occuper de la famille", confie-t-il à VOA Afrique.
Le Conseil territorial des jeunes, agriculteurs et éleveurs avec la société civile du territoire de Masisi, dans la province du Nord-Kivu, ont, à travers un communiqué de presse, voulu attirer l'attention du gouvernement sur la gravité des actes et la résurgence des conflits inter-ethniques entre les différentes tribus du groupement Nyamaboko.
Selon Télésphore Mitondeke, membre de la société civile de Masisi, les assaillants tuent les civils et visent aussi le bétail.
Il révèle qu'à Mahanga, chef-lieu de la localité de Butsike, et dans les entités environnantes, des tensions inter-ethniques et des actes de représailles sont monnaie courante depuis 2020. Il fait état de viols, de pillages et de demandes de rançons, occasionnant le déplacement forcé de la population locale.
Au moins 11 bergers ont été victimes d'assassinats ciblés par ethnie. Il répertorie aussi l'abattage criminel d'au moins 980 vaches, le vol d'au moins 1872 vaches, 503 porcs, 2122 chèvres, 1340 moutons.
Ce dernier estime que ces actes se multiplient à cause du nombre réduit d'éléments de l'armée congolaise.
"Tous ces actes se sont produits sans aucune réaction des soldats des FARDC en position à Mahanga, probablement à cause de leur sous-effectif, qui est encore estimé à plus ou moins dix soldats", déplore-t-il.
"Au fil des années, la population et les opérateurs économiques ont déjà perdu plusieurs millions de dollars. Sans compter l'accès limité aux services sociaux de base", ajoute-t-il.