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Série macabre de meurtres de femmes en Ouganda


Des présumés assassins sont embarqués dans un bus pour la prison, sous la surveillance de la police, à Kampala, Ouganda, 18 mai 2017.
Des présumés assassins sont embarqués dans un bus pour la prison, sous la surveillance de la police, à Kampala, Ouganda, 18 mai 2017.

Une série de meurtres de femmes, aussi mystérieux que macabres, perpétrés depuis quelques mois dans le sud de l'Ouganda suscite l'effroi des habitants, qui organisent des patrouilles citoyennes, alors que les autorités réfutent l'hypothèse d'un tueur en série.

"Nous n'arrêtons pas de trouver des corps. C'était une fois par mois, puis une fois toutes les deux ou trois semaines et enfin chaque semaine", constate Rose Nakasinge, une agricultrice d'âge mûr. "Il fallait qu'on fasse quelque chose".

Depuis mai, les corps affreusement mutilés d'au moins 20 femmes ont été retrouvés dans deux zones du comté de Wakiso. Les victimes étaient pour la plupart jeunes. Beaucoup ont été violées et étranglées, certaines avaient des parties du corps démembrées.

Fin août, la police avait annoncé avoir arrêté plus de 30 personnes et inculpé 13 d'entre elles pour "meurtre et terrorisme". Mais elle n'a rendu public aucun élément. Et les meurtres ont continué, forçant la population locale à intervenir.

Rose est membre d'une patrouille citoyenne, forte d'une dizaine de personnes, qui se déploie chaque nuit dans les environs de Katabi, sur une péninsule s'enfonçant dans le lac Victoria.

En enfilant une paire de bottes en caoutchouc pour sillonner ces terres marécageuses, Rose explique avoir vécu toute sa vie à Katabi, à 35 km au sud-ouest d'Entebbe. Mais parmi ceux qui l'accompagnent, certains sont des itinérants, venus trouver un travail intérimaire dans les fermes horticoles ou à l'aéroport international de la capitale.

"Ils viennent et partent, et on ne connaît pas la plupart d'entre eux", observe-t-elle. A 22h00, la patrouille, accompagnée d'un policier, s'ébranle. Elle arrête des voitures, les fouille et vérifie les papiers d'identité.

"Depuis que nous avons commencé à patrouiller, il n'y a pas eu de corps", affirme Rose. Marchant sur une file au milieu des pins et des eucalyptus, les patrouilleurs atteignent une carrière où les enfants jouent au football le jour. Ils s'arrêtent solennellement à l'endroit où le corps partiellement décomposé d'une femme de 31 ans, Faith Komugisha, a été découvert en juin.

"J'ai eu peur quand j'ai vu l'état dans lequel était le corps", admet Gilbert Besigye, le commandant de police qui accompagne la patrouille. "Sa peau était devenue blanche, elle avait un bout de bois dans les parties intimes, un sein avait été découpé, comme son visage. C'est comme si le tueur avait fabriqué un masque".

- 'Meurtres rituels' -

Officiellement, neuf corps ont été retrouvés autour de Katabi. Mais un journaliste local, Georgewilliam Kakooza, pense que le vrai chiffre est plus élevé.

"Les premiers corps ont été trouvés en février, mais personne n'a remarqué les similitudes. Certaines des femmes étaient des prostituées et elles étaient pauvres", explique-t-il.

Le journaliste a attentivement comparé ces meurtres. "Quelqu'un disparaît, puis quelques jours plus tard, parfois une semaine, son corps décomposé est découvert. Mais sur les lieux, il n'y a pas de sang, ni de signes de lutte. Je pense qu'on les emmène quelque part et qu'on abandonne ensuite leur corps".

Pour le porte-parole de la police nationale, Asan Kasingye, "il n'y a pas de tueur en série en liberté". Il a récemment mis cause "un gang criminel organisé ayant de forts liens avec des meurtres rituels", lors d'une conférence de presse.

Le chef de la police ougandaise, Kale Kayihura, a assuré "maîtriser la situation". Mais ces mots ne rassurent pas les femmes de la région.

Josephine, la grande soeur d'Annet Nakachwa, a été tuée en juillet à Nansana, une banlieue d'Entebbe. "A chaque fois qu'on part au travail, au retour on s'attend à ce que le pire arrive", confie la jeune fille de 17 ans.

Et alors que les cadavres s'accumulent, la confusion ne fait qu'augmenter. Au Parlement, le ministre de l'Intérieur Jeje Odongo a affirmé savoir que "deux hommes d'affaires" nommés dans la presse locale avaient engagé un tueur en série pour commettre des meurtres rituels censés leur apporter la prospérité. Des informations non confirmées par la police.

Le ministre a indiqué à l'AFP que l'homme avait été arrêté et avait reconnu avoir tué neuf femmes "qu'il avait étranglées avant de collecter leur sang". Mais il n'a apporté aucun élément susceptible d'étayer ses affirmations.

Avec AFP

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