Le groupe Etat islamique a libéré des centaines de civils qu'il avait emmenés comme boucliers humains en se retirant de son fief stratégique de Minbej, dans le nord de la Syrie, après avoir été mis en déroute par des combattants soutenus par Washington.
Les derniers jihadistes ont quitté la ville vendredi. Minbej leur servait de carrefour de ravitaillement vital entre la Turquie et le territoire qu'ils contrôlent en Syrie.
Il s'agit de la pire défaite du groupe aux mains des Forces démocratiques syriennes (FDS), coalition de combattants arabes et kurdes soutenue par les Etats-Unis.
Outre son importance stratégique pour l'approvisionnement des jihadistes, Minbej a été qualifiée par les Etats-Unis de "plaque tournante" de l'EI vers l'Europe, où le groupe a revendiqué plusieurs attentats meurtriers.
Chassés de Minbej --qu'ils contrôlaient depuis 2014-- après une bataille d'envergure de plus de deux mois, les jihadistes avaient emmené avec eux vendredi près de 2.000 civils, dont des femmes et des enfants.
Parmi eux "figurent des habitants qui ont été utilisés comme boucliers mais aussi beaucoup qui ont choisi de partir volontairement par peur de représailles" des FDS, explique Rami Abdel Rahmane, directeur de l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH).
Plusieurs centaines "sont désormais en liberté", a précisé l'OSDH qui dispose d'un large réseau d'informateurs à travers la Syrie en guerre.
'Plus aucun jihadiste'
Une source des FDS a pour sa part précisé à l'AFP qu'une "partie des civils avait pu s'échapper sur la route menant à Jarablous (fief de l'EI au nord de Minbej), d'autres ont été relâchés", sans pouvoir confirmer si tous avaient été libérés.
Quand leurs adversaires tentent de prendre les villes qu'ils contrôlent, les combattants de l'EI utilisent les civils comme boucliers humains, soit en se cachant parmi eux pour éviter les bombardements, soit en les prenant en otages.
Les FDS s'étaient emparées de Minbej le 6 août. Une poignée de jihadistes a résisté pendant une semaine, mais samedi, l'OSDH et la source des FDS ont confirmé la sortie de l'ensemble des combattants de l'EI.
"Il n'y a plus aucun combattant de l'EI", a indiqué une source des FDS.
"Il n'y a plus ni jihadistes ni partisans du groupe. Ils sont tous sortis", a indiqué à l'AFP M. Abdel Rahmane.
La télévision Kurdistan24, basée à Erbil (Irak), a diffusé des images de civils en liesse dans la ville, avec des femmes en niqab embrassant des combattantes kurdes, d'autres femmes le visage dévoilé portant leurs bébés, le sourire aux lèvres.
Devant la caméra, une femme brûle une longue robe noire imposée aux habitants par les jihadistes tandis que des hommes se coupaient la barbe avec des ciseaux. L'EI interdit aux hommes de se faire raser dans les zones qu'il contrôle en Syrie et en Irak.
"La bataille a été très dure", a affirmé une source kurde à l'AFP. "Et les jihadistes avaient posé des mines (...) dans la ville."
"Un combattant des FDS est entré vendredi dans une maison, il y a vu une chaussure placée sur un exemplaire du Coran, lorsqu'il a enlevé le soulier une explosion a été déclenchée et il a été tuée", raconte cette source.
Le correspondant de l'AFP avait constaté ces dernières semaines d'énormes destructions dans la ville, qui a été notamment pilonnée par la coalition internationale anti-jihadistes dirigée par Washington.
Selon l'OSDH, depuis le début de l'offensive lancée le 31 mai, 437 civils ont été tués dont 105 enfants dans Minbej et sa région. Parmi les civils, 203 ont péri dans les frappes aériennes de la coalition. Durant la même période, 299 membres des FDS ont péri, ainsi que 1.019 jihadistes.
Les FDS est l'une des principales forces antijihadistes en Syrie, où la guerre a fait depuis mars 2011 plus de 290.000 morts et jeté sur les routes des millions de personnes.
L'EI, responsable d'atrocités -enlèvement, viols, décapitations- continue de contrôler de vastes régions du nord syrien.
Déclenché par la répression de manifestations pacifiques pro-démocratie, le conflit en Syrie s'est complexifié avec l'intervention de pays étrangers et la montée en puissance de jihadistes.
Avec AFP