Les cas de l'Allemand Mesut Özil et du Chilien Alexis Sanchez à Arsenal illustrent cette nouvelle donne, alors que le marché des transferts d'hiver sera clos mardi soir.
Ces deux footballeurs de classe internationale exigeraient un salaire de près de 1,1 million de livres par mois (1,3 million d'euros), soit bien plus que leur salaire actuel d'environ 600.000 livres, faisant valoir que la baisse de la monnaie britannique représente un manque à gagner par rapport à leurs actifs à l'étranger.
Certains joueurs ont déjà négocié de confortables prolongations, à l'image du Brésilien Philippe Countinho, qui va toucher au minimum 650.000 livres (plus de 700.000 euros) par mois jusqu'en 2022 à Liverpool.
"Si les supporters tendent à associer la valeur d'un joueur aux montants des transferts, il faut rappeler que ces derniers ne représentent qu'un tiers du coût total pour un joueur", rappelle Jake Cohen, avocat spécialisé dans le sport au cabinet Mills & Reeve.
"La majorité du coût pour un joueur vient du salaire", précise-t-il, ce qui explique pourquoi les taux de change compliquent la tâche pour les clubs.
Depuis que les Britanniques ont décidé de quitter l'Union européenne en juin, la livre a plongé d'environ 14% face à l'euro et 18% face au dollar.
Certains footballeurs étrangers signent même des contrats leur permettant d'être payés dans d'autres devises plutôt qu'en livres.
Les clubs anglais ont pris le problème à bras le corps en passant des accords, notamment publicitaires, avec des sociétés financières spécialisées dans les changes qui en retour leur assurent des taux de conversion plus avantageux.
"Toute entreprise présente à l'international doit envisager des contrats de couverture sur les changes, et les clubs de football sont particulièrement concernés", assure Jake Cohen à l'AFP.
D'ailleurs, en dehors des transferts, les clubs ont l'habitude de négocier des contrats en devise étrangère, notamment dans le sponsoring, observe-t-il.
Appétit chinois
"La faiblesse de la livre a un impact immédiat sur les salaires mirobolants des joueurs, ce qui fait que les agents, ne pouvant pas décrocher de tels contrats ailleurs en Europe, essaient d'obtenir le maximum" en Angleterre, explique à l'AFP Craig Erlam, analyste chez Oanda.
"Ils savent très bien que les clubs peuvent se permettre de répondre à leurs exigences en raison des nouveaux accords sur les droits télévisés", ajoute-t-il.
Malgré le recul de la livre, le fossé reste abyssal entre les droits reversés aux 20 clubs de la première division anglaise par rapport aux autres championnats européens.
Y compris en Espagne, selon M. Cohen: "La baisse de la livre peut en théorie aider la Liga, mais pour combler l'écart il faudra bien plus qu'une hausse de 10 à 15% de l'euro, qui peut ne pas durer."
Malgré une saison dernière en demi-teinte, Manchester United est redevenu cette année le plus riche du monde pour la première fois depuis 2003-2004, selon l'étude annuelle du cabinet Deloitte.
ManU a cumulé 689 millions d'euros de revenus lors de la saison 2015-2016, chipant la première place au Real Madrid qui la détenait depuis 11 ans.
Les clubs de l'élite anglaise profitent de la manne des droits télévisés qui s'élève à un total de 5,14 milliards de livres (6 milliards d'euros au taux de change actuel) jusqu'à 2019, soit 70% de plus que le précédent accord.
Les droits grimpent jusqu'à 8,3 milliards de livres à l'échelle mondiale et pourraient être tirés vers le haut à l'avenir par l'intérêt grandissant de la Chine pour le football.
Des clubs chinois qui n'hésitent d'ailleurs pas à faire miroiter des salaires astronomiques pour attirer les vedettes.
M. Erlman juge ainsi que "ce n'est pas un hasard si certains footballeurs, qui sont clairement venus en Angleterre pour profiter de l'argent de la télévision, utilisent désormais la Chine pour essayer de conclure un meilleur contrat".
Avec AFP