Les diplomaties russe et américaine, qui ont "suspendu" il y a dix jours leur dialogue "bilatéral" sur la Syrie, ont annoncé mercredi deux réunions internationales: la première samedi à Lausanne et la seconde dimanche à Londres.
Ces réunions, voulues par le secrétaire d'Etat américain John Kerry et qui pourraient être celles de la dernière chance, se tiendront dans un climat particulièrement lourd entre Moscou et les Occidentaux. Sur fond d'accusations de "crimes de guerre" en raison du déluge de feu russo-syrien sur Alep.
"A Lausanne, le principal sujet de conversation sera la brutalité continue du siège d'Alep et les frappes intentionnelles de l'armée russe et du régime syrien", a prévenu le porte-parole du département d'Etat John Kirby.
John Kerry retrouvera son homologue russe Sergueï Lavrov, mais ils seront entourés de ministres de pays du Golfe et de la Turquie pour "parler d'une approche multilatérale de résolution de la crise en Syrie, notamment une cessation durable de la violence et la reprise de l'aide humanitaire", a expliqué M. Kirby.
A Moscou, le président "Vladimir Poutine a exprimé l'espoir que la rencontre prévue le 15 octobre à Lausanne (...) soit productive afin de contribuer réellement au règlement" du conflit syrien, selon le Kremlin.
Interrogé par CNN, M. Lavrov a précisé que les discussions se dérouleraient en présence de la Turquie, de l'Arabie saoudite et peut-être du Qatar, trois pays qui soutiennent l'opposition syrienne. Mais ni Moscou, ni Washington n'ont confirmé la présence de l'Iran, allié du président Bachar al-Assad.
Au lendemain de Lausanne, John Kerry retrouvera dimanche à Londres ses "partenaires internationaux", c'est-à-dire le Royaume-Uni, l'Allemagne et la France.
Lors d'une conversation téléphonique mercredi, le président français François Hollande et la chancelière allemande Angela Merkel ont exhorté M. Poutine à oeuvrer en faveur d'un cessez-le-feu en Syrie, après des échecs répétés pour imposer une trêve.
- Tension au plus haut -
La tension entre Moscou et les Occidentaux est au plus haut et le chef du Kremlin, qui a dû annuler une visite à Paris la semaine prochaine après les conditions posées par son homologue français, a rétorqué que personne ne réussirait à "isoler" la Russie.
Moscou a été accusé par les Occidentaux, Etats-Unis en tête, de perpétrer des "crimes de guerre" à Alep avec son allié syrien: c'est de "la rhétorique politique", a répondu le président russe sur la télévision française TF1.
Le week-end dernier, le climat diplomatique s'était encore alourdi avec un veto russe à une résolution française au Conseil de sécurité de l'ONU. Ce texte avait pour but de pousser la Russie à opposer son veto, a accusé Vladimir Poutine. "Et pour quoi faire? Pour envenimer la situation et attiser l'hystérie antirusse", a-t-il tonné à Moscou.
Washington avait évoqué de possibles sanctions supplémentaires contre la Russie et la Syrie, mais le chef de la diplomatie française Jean-Marc Ayrault s'est dit opposé au fait de "rentrer dans un cycle de sanctions pour les sanctions".
Mercredi, la Nouvelle-Zélande, un des dix membres non permanents du Conseil de sécurité de l'ONU, a présenté à son tour un projet de résolution demandant l'arrêt des bombardements sur Alep.
- Le dialogue Moscou-Washington 'n'est pas mort' -
Lausanne marquera la première entrevue entre MM. Kerry et Lavrov depuis le gel de leurs négociations, annoncé le 3 octobre par Washington dans la foulée de l'échec le 19 septembre d'un cessez-le-feu qu'ils avaient initié et qui n'a duré qu'une semaine.
Mais leur dialogue sur la Syrie n'a jamais vraiment été rompu. Le département d'Etat a d'ailleurs souligné que si les discussions "bilatérales" étaient "suspendues", elles n'étaient "pas mortes" et il n'a pas exclu un tête-à-tête à Lausanne.
Sur le terrain, des frappes aériennes et des tirs d'artillerie visant des zones rebelles d'Alep ont tué au moins sept personnes, selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH).
Mardi, 27 personnes ont été tuées dans des bombardements alors que la Russie a intensifié ses raids sur Alep-est en soutien à une opération de l'armée du régime pour reprendre un secteur rebelle de la deuxième ville du pays, selon l'OSDH.
Depuis mars 2011, le terrible conflit syrien est devenu plus complexe et internationalisé, provoquant la mort de plus de 300.000 personnes et la fuite de millions d'autres.
Avec AFP