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Des questions demeurent au procès de la tuerie de l'armée en RDC


Avant la tuerie, des négociations entre l'armée et les fidèles avançaient bien, mais au milieu des négociations, les militaires ont ouvert le feu sur les adeptes désarmés.
Avant la tuerie, des négociations entre l'armée et les fidèles avançaient bien, mais au milieu des négociations, les militaires ont ouvert le feu sur les adeptes désarmés.

Qui a donné l'ordre? A quel moment et pourquoi l'armée a-t-elle tiré sur des civils? Après deux semaines d'un procès agité, les questions demeurent sur la mort de plus de 50 personnes le 30 août à Goma, dans l'est de la RD Congo.

Les témoins appelés à la barre de la cour militaire du Nord-Kivu, qui juge depuis le 5 septembre six militaires dont deux officiers, ont jusqu'à présent battu en brèche la version officielle sur les circonstances de ce massacre, qui a provoqué un regain de tension à Goma, au coeur d'une région en proie aux violences armées et rébellions.

Après une visite sur place de plusieurs ministres, le gouvernement a rapidement annoncé des arrestations de militaires et promis que justice serait faite. Mais le ministre de l'Intérieur notamment, Peter Kazadi, a indiqué que la Garde républicaine était intervenue en représailles du lynchage d'un policier par des adeptes d'une secte qui avait appelé à manifester ce jour-là contre la présence des forces de l'ONU et d'Afrique de l'Est.

Or, ces témoins, parmi lesquels deux colonels, affirment que l'opération a été lancée au milieu de la nuit, avant la mort du policier. Selon eux, un assaut a été mené vers 03H00 (01H00 GMT) contre les locaux de la radio de la secte, où au moins cinq personnes ont été exécutées par des "militaires cagoulés". La plupart des morts avaient ensuite été enregistrées dans l'église de la secte.

Au moment où les troupes se dirigeaient vers l'église, "le policier n'était pas encore mort", a assuré le premier témoin, un colonel du service des renseignements militaires. Quelques jours après son audition, la cour apprendra qu'il a été hospitalisé pour "empoisonnement".

Les témoins des parties civiles se sont quant à eux présentés le visage masqué par des sortes de cagoules en tissus vert et jaune, afin de protéger leurs identités. La plupart sont des adeptes de la secte ou des habitants du quartier où a eu lieu la fusillade.

Rwanda et M23

Tous s'accordent sur un point: avant la tuerie, des négociations entre l'armée et les fidèles avançaient bien, sans hostilité particulière, et quatre émissaires avaient été identifiés pour aller déposer un mémo à la mission de l'ONU. Mais au milieu des négociations, les militaires ont ouvert le feu sur les adeptes désarmés.

La question reste de savoir si le colonel de la Garde républicaine Mike Mikombe, un des accusés, a donné l'ordre de tirer, et s'il l'a fait pour répondre à des ordres ou a agi de son propre chef.

Au procès, il a laissé entendre qu'il avait été induit en erreur par un "ordre opérationnel" de la 34e région militaire (Nord-Kivu) présentant les adeptes de la secte comme des "supplétifs" des rebelles du M23 et de l'armée rwandaise – qui occupent des pans entiers de la province – chargés de "faciliter l'infiltration de l'ennemi" en "semant des troubles dans la ville".

Durant l'opération militaire du 30 août, plus de 140 civils, dont une trentaine de mineurs, ont été arrêtés "pour participation à un mouvement insurrectionnel, association de malfaiteurs et meurtre".

Selon une mère qui tente encore de voir son fils de 17 ans détenu à la prison de Goma, les militaires ont emmené l'adolescent "par la force", l'accusant d'être un rebelle, alors que lui et sa famille étaient chez eux. Elle "supplie les autorités de le libérer", afin qu'il puisse "reprendre le chemin de l'école".

La tension a aussi été aggravée par le traitement réservé aux victimes du massacre. Pendant près de deux semaines, leurs proches n'ont pas été autorisés à accéder à la morgue de l'hôpital militaire, où les corps avaient été transportés pêle-mêle dans des camions de l'armée.

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Le 12 septembre, les familles ont enfin pu rentrer dans la cour de la morgue pour les identifier. Une cinquantaine de cadavres étaient posés sur le sol, dans des sacs mortuaires, "dans un état de putréfaction très avancée", "méconnaissables", selon le frère d'une victime. Leurs obsèques ont eu lieu lundi dans un cimetière de la périphérie de Goma, à la nuit tombée et sous une pluie battante.

Le procès devrait reprendre mercredi, après une suspension de deux jours.

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