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Un Marocain rapatrié après 19 ans de détention à Guantánamo sans être inculpé


Un drapeau américain flotte derrière les barbelés à la base navale de Guantanamo Bay, à Cuba, le 17 avril 2019.
Un drapeau américain flotte derrière les barbelés à la base navale de Guantanamo Bay, à Cuba, le 17 avril 2019.

L'administration Biden a rapatrié lundi au Maroc Abdullatif Nasser, un sujet marocain qui était détenu à la prison de Guantánamo Bay depuis 19 ans sans être inculpé d’un crime quelconque.

Située sur une base navale américaine à Cuba, la prison de Guantanamo Bay avait ouvert ses portes sous la présidence de George W. Bush après les attentats de 2001 menés par Al-Qaïda.

M. Nasser, la cinquantaine aujourd'hui, avait été enfermé dans ce complexe pénitentiaire en 2002. Depuis, aucune charge formelle n’a été retenue contre lui.

Son voyage vers cette prison notoire a été long.

Dans les années 1980, il avait intégré un groupe islamique soufi marocain non violent, selon son dossier au Pentagone. En 1996, il est recruté pour combattre en Tchétchénie et il se retrouve en Afghanistan, où il est formé dans un camp d'Al-Qaïda. Il est capturé après avoir combattu les forces américaines en Afghanistan puis envoyé à Guantánamo en mai 2002.

Pendant près de deux décennies d’emprisonnement, il s’adonne à des études de mathématiques, d'informatique et d'anglais et parvient à rédiger un dictionnaire arabe-anglais de 2 000 mots, selon un responsable du Pentagone non identifié.

Cette photo non datée publiée par l'avocat Shelby Sullivan-Bennis le 11 décembre 2017 montre son client, le Marocain Abdullatif Nasser, à la prison de Guantanamo Bay, à Cuba.
Cette photo non datée publiée par l'avocat Shelby Sullivan-Bennis le 11 décembre 2017 montre son client, le Marocain Abdullatif Nasser, à la prison de Guantanamo Bay, à Cuba.

L’intéressé est arrivé au Maroc lundi.

La police l'a placé en garde à vue et a déclaré qu'elle enquêterait sur lui parce qu'il est soupçonné d'avoir commis des actes terroristes - bien qu'il n'ait jamais été inculpé lorsqu'il était à Guantánamo.

Son avocat au Maroc, Khalil Idrissi, a déclaré que les années passées par son client à Guantánamo "étaient injustifiées et hors la loi, et ce qu'il a subi reste une tache de disgrâce sur le front du système américain".

L’impossible fermeture

Avec la libération du Marocain, l'administration Biden fait un pas en avant vers son objectif de fermer la prison de Guantánamo Bay où sont détenus depuis près de 20 ans des ressortissants de pays tiers soupçonnés d'actes de terrorisme.

Lorsqu'il était au pouvoir, l'ancien président Barack Obama – dont Joe Biden était le vice-président – avait tenté sans succès de faire fermer la prison. À chaque fois, l'opposition menée par des politiciens américains conservateurs a bloqué l'effort.

Pour leur part, les organisations de défense des droits humains ont qualifié le camp de détention, ouvert après les attentats de 2001 menés par Al-Qaïda, d’erreur monumentale. Des allégations de torture ont été formulées lors des premiers interrogatoires et la légalité des tribunaux militaires a été contestée.

Une commission d'examen avait recommandé le rapatriement d’Abdullatif Nasser en juillet 2016, mais le Marocain est resté à Guantánamo sous la présidence de Donald Trump, qui s'opposait à la fermeture de la prison.

Près de 800 détenus

Près de 800 détenus sont passés par Guantánamo. Sur les 39 qui restent, 10 peuvent être transférés, 17 peuvent subir une évaluation en vue d'un éventuel transfert, 10 autres sont dans les tribunaux militaires utilisés et deux ont été condamnés, a déclaré un haut responsable de l'administration.

Les États-Unis ont remercié le Maroc d'avoir facilité le rapatriement de M. Nasser.

"Les États-Unis félicitent le Royaume du Maroc pour son partenariat de longue date dans la sécurisation des intérêts de sécurité nationale des deux pays", indique un communiqué du Pentagone. "Les États-Unis sont également extrêmement reconnaissants de la volonté du Royaume de soutenir les efforts actuels des États-Unis pour fermer le centre de détention de Guantánamo Bay."

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