La Commission, lancée en octobre dans ce petit pays anglophone d'Afrique de l'Ouest enclavé dans le Sénégal, à l'exception d'une étroite façade côtière prisée des touristes, a débuté ses auditions en janvier.
Yankuba Touray, plusieurs fois ministre sous Yahya Jammeh, a été arrêté samedi à la suite de l'audition la semaine dernière par la TRRC de l'ex-sergent Alagie Kanyi.
Devant la Commission, ce dernier a reconnu avoir participé au meurtre d'autres soldats en novembre 1994 et à celui du ministre des Finances Ousman Koro Ceesay, retrouvé carbonisé dans sa voiture officielle en juin 1995 sur la route conduisant à l'aéroport.
M. Kanyi a également affirmé que Yankuba Touray, impliqué selon lui dans le meurtre du ministre, lui avait dit en janvier de "ne pas s'inquiéter de cette Commission qui ne peut rien lui faire".
Instituée par une loi en décembre 2017 et composée de 11 membres, la TRRC dispose de pouvoirs d'enquête et pourra, au terme de ses travaux prévu dans deux ans, recommander des poursuites ou des réparations, mais pas prononcer de condamnations.
Un tribunal de Kanifing (banlieue de Banjul) a inculpé lundi Yankuba Touray d'"actions visant à interférer ou à faire obstruction au travail de la Commission", a déclaré le procureur Almameh Manga.
L'accusé a plaidé non coupable et a été libéré sous caution avec interdiction de quitter le pays.
C'est la première fois qu'une personne est accusée de subornation de témoins depuis le lancement de la Commission, qui a auditionné depuis janvier 44 témoins dont d'anciens ministres et des militaires.
Les défenseurs des droits humains ont accusé le régime de Yahya Jammeh d'actes systématiques de torture contre des opposants et des journalistes, d'exécutions extra-judiciaires, détentions arbitraires et disparitions forcées.
Parvenu au pouvoir par un putsch sans effusion de sang en 1994, M. Jammeh s'était fait largement élire et réélire sans interruption jusqu'à sa défaite en décembre 2016 face à l'opposant Adama Barrow.
Après six semaines d'une crise à rebondissements provoquée par son refus de céder le pouvoir, il a finalement dû quitter le pays le 21 janvier 2017 pour la Guinée équatoriale à la suite d'une intervention militaire de la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (Cédéao) et d'une ultime médiation guinéo-mauritanienne.