Une telle surveillance "est contraire à qui nous sommes. Et cela ne nous aidera pas à vaincre l'Etat islamique", a tonné mercredi Barack Obama. "Une approche qui les singulariserait ou les ciblerait pour les discriminer est non seulement erronée et non-Américaine, elle serait aussi contre-productive", a insisté le président.
Après les attentats qui ont fait au moins 31 morts mardi à Bruxelles, revendiqués par le groupe jihadiste EI, Ted Cruz n'avait pas hésité: "nous devons permettre à la police de patrouiller et sécuriser les quartiers musulmans avant qu'ils ne se radicalisent", avait-il déclaré.
Son rival Donald Trump, qui prône sans complexe la torture pour les suspects de terrorisme, a trouvé que c'était "une bonne idée".
Plusieurs organisations de défense des musulmans s'en sont émues et Twitter s'est enflammé avec le hashtag #MuslimNeighborhood (quartier musulman) racontant la vie et les actes de générosité dans ces quartiers.
Le chef de la police de New York Bill Bratton a été l'un des critiques le plus véhément de cette proposition.
- 1.000 policiers musulmans à New York -
"Il ne sait vraiment pas de quoi il parle", a déclaré M. Bratton, en rappelant que près de 1.000 policiers new-yorkais étaient musulmans et que quand M. Cruz venait à New York, il était probablement protégé par certains d'entre eux. M. Bratton s'est dit sur CBS "très offensé" par les remarques du sénateur ultra-conservateur du Texas.
D'autant que M. Cruz, pour son idée de patrouiller les quartiers musulmans, a cité en modèle un programme secret de surveillance mis en place après les attentats du 11-Septembre à New York, quand Michael Bloomberg était maire.
Des policiers en civil avaient pour mission de surveiller la communauté musulmane, ses lieux de culte, ses restaurants, librairies et magasins et de documenter ce qu'ils voyaient et entendaient.
Très controversé, le programme, objet de plusieurs plaintes en justice, a été officiellement abandonné en avril 2014.
M. Bratton a souligné qu'il n'avait pas permis de découvrir la moindre information.
"Je voudrais rappeler au sénateur qu'il vit aux Etats-Unis", avait déjà déclaré M. Bratton mardi lors d'une conférence de presse. "Et la déclaration qu'il a faite (sur les patrouilles) est la raison pour laquelle il ne deviendra pas président".
Ted Cruz, qui avait déjà provoqué un tollé en attaquant New York sur ses valeurs en janvier, n'a pas été impressionné. "Ce n'est pas surprenant que les hommes de main démocrates du maire de Blasio m'attaquent, et c'est sur instructions du maire", a-t-il déclaré sur CBS.
"Hier nous avons vu une affreuse attaque terroriste à Bruxelles. Ce n'était pas un loup solitaire. Ce n'était pas un attentat isolé. C'était du terrorisme radical islamiste. C'était l'Etat islamique qui (...) nous a déclaré la guerre. Et malheureusement, le président Obama et Hillary Clinton et le maire de Blasio, les élus démocrates sont tellement liés par le politiquement correct qu'ils refusent de prononcer le mot terrorisme radical islamiste. Et ils refusent de tenter sérieusement d'en venir à bout", a-t-il dit.
Interrogé sur le nombre de musulmans aux Etats-Unis, M. Cruz a admis qu'il ne le connaissait pas (environ 3,3 millions).
La principale association de défense des musulmans CAIR (Council on American-Islamic Relations) lui a demandé de "se rétracter et de s'excuser pour sa proposition anticonstitutionnelle", et a dénoncé dans un communiqué "un appel à un traitement des musulmans comparable au fascisme".
Sur Twitter, le hashtag #MuslimNeighborhood a fleuri.
"Dans mon #quartiermusulman, vous verrez des gens distribuer de l'eau propre aux victimes de la crise de l'eau à Flint" (Michigan, nord), avait écrit un internaute, photos à l'appui, dans un message retweeté plus de 1.200 fois. "@tedcruz bonne chance pour essayer de distinguer un quartier musulman d'un autre, car les musulmans sont une partie intégrante du tissu américain", affirmait un autre tweet. Un troisième montrait trois jeunes femmes souriantes. "Hey @tedcruz, choisis les deux qui sont musulmanes et patrouille nous", disait-il.
Avec AFP