Institution publique statutairement indépendante, l'EHRC a publié son premier rapport annuel depuis la réforme qui a porté mi-2019 Daniel Bekele à sa tête et a redonné de la crédibilité à un organisme à la réputation dégradée.
"Ce rapport détaille un certain nombre de graves violations des droits humains commises à la fois par les acteurs étatiques et non-étatiques dans un contexte de conflits" dans plusieurs régions d'Ethiopie et "perpétrées avec une brutalité et une cruauté extrêmes", a expliqué M. Bekele en le présentant à Addis Abeba.
"Mort, blessures physiques et psychosociales, violences sexuelles et sexistes, déplacements de populations et destructions de biens" ont été infligés à des civils, notamment "femmes, enfants, personnes âgées ou handicapées". En outre, "des acteurs non-étatiques sont responsables de violations à grande échelle", telles que des "tueries ethniques ou religieuses et déplacements forcés" de civils.
Un conflit armé oppose depuis novembre 2020 le gouvernement fédéral éthiopien aux autorités rebelles de la région septentrionale du Tigré. Une rébellion est également active en Oromia, région la plus vaste et peuplée du pays, et l'Ethiopie a récemment connu plusieurs épisodes de violences à caractère ethnique.
Dans les zones de conflit, "les droits à la vie, à la sécurité, à la justice, le droit de ne pas être soumis à des traitements ou châtiments cruels, inhumains ou dégradants ont été violés" par l'ensemble des belligérants, a souligné M. Bekele.
Hors zones de conflit, la Commission a également constaté que des détenus avaient été soumis à des "traitements illégaux, à des détentions prolongées avant jugement et des tabassages" dans "des commissariats ou des centres de détention non-officiels". Et certains ont continué d'être détenus "en violation de décisions judiciaires les libérant sous caution ou abandonnant les accusations".
La période de l'état d'urgence, imposé entre novembre et février, a notamment été marquée par un nombre important d'arrestations arbitraires et de détentions illégales, selon M. Bekele. Interrogé sur l'apparente impunité autour de ces faits, il s'est félicité de certains "pas encourageants dans la bonne direction" de la part des autorités. "Mais cela ne va probablement pas assez vite et pas avec la transparence et l'efficacité voulue", a-t-il reconnu.
La mise en détention de professionnels de la presse, en violation de la loi sur les médias, est aussi "un sujet très inquiétant", a déclaré la vice-présidente de la Commission Rakeb Messele à l'AFP.
Il y a eu en Ethiopie, des "développements positifs" en matière de droits humains, "sur lesquels nous voulons que le gouvernement continue de travailler". Mais "tant qu'il n'y aura pas de solution politique" aux conflits dans le pays, "je crains que les violations des droits de l'Homme continuent et s'aggravent", a-t-elle déploré.