Après des bombardements nocturnes menés aussi bien par le régime que par les rebelles, un calme précaire régnait dimanche matin à Alep (nord), mais les habitants sont restés terrés chez eux de crainte d'une reprise des violences, selon un correspondant de l'AFP sur place.
Des dizaines d'habitants des secteurs contrôlés par les rebelles avaient fui samedi les raids aériens intensifs et sanglants du régime dans la deuxième ville du pays qui est devenue le principal champ de bataille d'une guerre civile entrée dans sa sixième année.
Alors que le processus de paix ne tient qu'à un fil, M. Kerry est attendu à Genève pour discuter avec l'émissaire de l'ONU Staffan de Mistura et ses homologues saoudien et jordanien du cessez-le-feu et de la transition politique pour tenter de mettre fin à une guerre qui a fait plus de 270.000 morts depuis 2011.
Initiée par Washington et Moscou, qui soutiennent les camps adverses en Syrie, cette trêve entrée en vigueur le 27 février, a volé en éclats avec les raids acharnés du régime du président Bachar al-Assad sur Alep depuis le 22 avril.
M. Kerry s'est entretenu vendredi et samedi au téléphone avec M. de Mistura et le coordinateur de l'opposition syrienne Riad Hijab et leur a dit "clairement que la fin des violences à Alep et le retour au bout du compte à une cessation durable (des hostilités) étaient la première des priorités".
Préparer une offensive contre Alep
Il a de nouveau demandé à la Russie "de prendre des mesures pour arrêter les violations du régime, notamment les attaques aveugles sur Alep".
Quelques heures plus tôt, la Russie, allié indéfectible de M. Assad qui combat à ses côtés rebelles et jihadistes, affirmait qu'elle ne lui demanderait pas de cesser ses bombardements sur Alep, en parlant "d'une lutte contre la menace terroriste".
Samedi, une trentaine de raids du régime ont touché les quartiers rebelles faisant dix morts dont deux enfants selon la défense civile dans la partie rebelle d'Alep où résideraient encore quelque 200.000 habitants.
Le même jour, un grand nombre de familles ont fui le quartier de Boustane al-Qasr, violemment bombardé depuis plusieurs jours. Certaines se réfugient dans des quartiers plus sûrs, d'autres quittent la ville par la route du Castello, seule sortie pour eux. Mais cette voie est très dangereuse en raison des tireurs embusqués.
Depuis le 22 avril, plus de 246 civils ont péri dans les bombardements et les tirs de l'armée et des rebelles.
Le régime Assad s'acharne contre Alep "car il veut pousser à l'exode ses habitants en vue d'une offensive militaire" pour reprendre les quartiers rebelles, estime l'OSDH.
"#AleppoIsburning"
Dimanche matin, aucun raid n'a été mené sur les quartiers rebelles, selon un correspondant de l'AFP sur place. Mais les rues étaient désertes, nul n'osant s'aventurer à l'extérieur de peur de nouvelles frappes.
Des raids ont été néanmoins signalés à Layramoun, banlieue rebelle à la périphérie nord de la ville.
Face à la tragédie d'Alep, le hashtag "#AleppoIsburning" a été relayé massivement sur les réseaux sociaux et appelle à des manifestations de solidarité dans plusieurs pays du 30 avril au 7 mai.
Pour le chef de la Coalition nationale syrienne, principal groupe d'opposition en exil, les chances d'une solution politique sont en danger à moins que la communauté internationale ne fasse pression sur le régime pour qu'il cesse ses raids sur Alep.
"Le régime n'est intéressé ni par une solution politique ni par une cessation des hostilités", a déclaré à Istanbul Anas al-Abdeh, en estimant qu'il revenait aux Etats-Unis de sauver le processus de paix de Genève dans l'impasse.
Aucune date précise n'a été fixée pour un prochain round de pourparlers, mais l'espoir d'un règlement de ce conflit très complexe est quasi inexistant tant les divergences sont profondes.
Déclenché par la répression sanglante de manifestations réclamant la démocratie, le conflit s'est transformé en une guerre impliquant une multitude d'acteurs, syriens et étrangers. Outre les centaines de milliers de victimes, il a déplacé plus de la moitié de la population et provoqué un désastre humanitaire.
La communauté internationale est notamment soucieuse d'en finir avec la menace des groupes jihadistes qui occupent de vastes territoires en Syrie et en Irak voisin et de freiner la fuite des Syriens arrivés aux portes de l'Europe.
Avec AFP