"Des dizaines de miliciens Houthis et leurs alliés, arrivés à bord de blindés et de transports de troupes, viennent d'entrer au palais présidentiel Al-Maachiq", a déclaré à l'AFP un haut gradé des services de sécurité, qui a été témoin de l'arrivée des rebelles dans le complexe.
Ces miliciens ont rencontré une forte résistance des Comités populaires, force paramilitaire qui tentait en fin d'après-midi de les déloger de cet ensemble de bâtiments nichés au sommet d'une colline qui descend abruptement vers la mer.
On ne peut y accéder que par une route tortueuse depuis le centre du quartier de Crater à Aden, deuxième ville du Yémen, située dans le sud.
En début de soirée, un responsable du ministère de la Défense a confirmé la chute du palais, précisant qu'il était désormais contrôlé par "des forces spéciales de la Garde républicaine, fidèles à Ali Abdallah Saleh", ancien président.
Ce développement significatif est intervenu au huitième jour de la campagne aérienne d'une coalition arabe dirigée par Ryad qui a juré de défaire les rebelles chiites Houthis qui contrôlent déjà la capitale Sanaa et plusieurs régions du Yémen.
La prise du palais présidentiel s'est produite après de violents combats. Au moins 44 personnes, dont 18 civils, ont été tuées dans ces affrontements qui ont opposé les rebelles à des forces favorables au président Abd Rabbo Mansour Hadi qui a quitté Aden le 26 mars.
A Ryad, le général Ahmed Assiri, porte-parole de la coalition, a déclaré jeudi soir à la presse que la situation à Aden est "stable".
"Les milices Houthis ne contrôlent aucun bâtiment gouvernemental à Aden", a-t-il dit, assuré sans cependant évoquer spécifiquement le palais présidentiel.
- Dommages collatéraux -
"Vingt (rebelles) Houthis ont été tués dans les combats", a indiqué à l'AFP une source militaire, alors qu'une source médicale a fait état de "la mort de 18 civils et de 6 membres des comités populaires".
Le palais avait subi deux raids aériens en mars, attribués aux Houthis, alors que le président Hadi y résidait encore. Il s'est finalement réfugié le 26 mars en Arabie saoudite, le jour même où celle-ci déclenchait ses raids sur le Yémen.
En dépit des affirmations de la coalition sur un strict blocus maritime, des militaires fidèles d'Ali Abdallah Saleh et alliés aux Houthis, ont apparemment effectué un petit débarquement de renforts à Aden jeudi.
"Je peux vous confirmer (que les éléments qui ont débarqué à Aden) ne sont pas des forces spéciales saoudiennes", a déclaré à l'AFP un conseiller saoudien qui a refusé d'être identifié.
Il s'agit de "forces spéciales yéménites loyales" à l'ex-président Saleh, a-t-il assuré, ajoutant qu'elles "sont arrivées à bord d'un petit bateau dans le quartier de Crater".
Selon un diplomate occidental à Ryad, les rebelles "maintiennent la pression sur Aden, qui est le point faible dans la stratégie saoudienne" car les forces pro-Hadi sont selon lui désorganisées.
Avec cette opération de la coalition, l'Arabie saoudite sunnite a dit vouloir stopper "l'influence" de l'Iran chiite auxquels sont liés les Houthis.
Cependant, en dépit de nombreuses frappes qui ont permis de dégrader ou de détruire une partie des installations de ses ennemis, la coalition commence à faire face à des critiques en raison des dommages collatéraux provoqués par les raids.
- Al-Qaïda libère des détenus -
Les morts et les blessés civils se comptent par centaines depuis le 26 mars. A l'instar d'agences de l'ONU et de nombreuses ONG, Action contre la faim a appelé la communauté internationale à "reconnaître la sévérité de la crise humanitaire", jugeant nécessaire une assistance "massive".
Signe également de difficultés de la coalition, l'Arabie saoudite a annoncé jeudi qu'un garde-frontière avait été tué et au moins cinq blessés par des "tirs nourris depuis une zone montagneuse à l'intérieur" du Yémen.
Profitant du chaos dans l'ensemble du Yémen, le réseau Al-Qaïda dans la Péninsule arabique (Aqpa) a lancé jeudi avant l'aube un assaut contre la prison centrale de Moukalla, dans la province de Hadramout, voisine d'Aden, et libéré plus de 300 détenus, dont un de ses chefs Khaled Batarfi, selon une source de sécurité.
Les insurgés d'Al-Qaïda ont attaqué également plusieurs bâtiments publics à Moukalla et des affrontements ont éclaté sur le port, autour d'un palais présidentiel, de la Banque centrale et des locaux des services de renseignement, défendus par des gardes armés, ont indiqué des sources sécuritaires.